Scrutin n Les Espagnols ont commencé à voter ce dimanche pour des élections législatives représentant un grand saut vers l'inconnu… Ce scrutin est marqué par l'érosion de la droite au pouvoir et l'arrivée des nouveaux partis Ciudadanos et Podemos, réclamant davantage de démocratie. «Ya hemos ganado» («On a déjà gagné»), aiment dire les partisans de Podemos (gauche radicale) et de Ciudadanos (libéral). Tous en sont sûrs. Au lendemain du scrutin qui s'est ouvert ce dimanche à 09h00 (08h00 GMT) et s'étend jusqu'à 20h00 (19h00 GMT), les formations traditionnelles devront écouter leur exigence de régénération démocratique, de transparence et d'honnêteté après des années de crise et de scandales de corruption. Rouge et bleu: le PSOE et le PP alternaient jusque-là au pouvoir, relativement cordialement. Le royaume d'Espagne, après avoir étouffé une tentative de coup d'Etat en 1981, a vécu 21 ans de socialisme, de 1982 à 1996 avec Felipe Gonzalez puis José Luis Rodriguez Zapatero (de 2004 à 2011), et douze ans avec la droite menée par José Maria Aznar (1996 à 2004) et Mariano Rajoy depuis 2011. Mais l'explosion de la bulle immobilière, les politiques d'austérité, un chômage qui s'envolait (jusqu'à 27% début 2013) et les scandales de corruption touchant l'ensemble de l'establishment, y compris une fille de l'ancien roi Juan Carlos, ont représenté un cocktail explosif. «No nos representan». «Ils ne nous représentent pas», ont crié dans la rue les manifestants «indignés» par leur classe politique, dès 2011. Depuis, le chômage a reflué, mais concerne encore un actif sur cinq. La croissance aussi a repris, mais elle n'est pas ressentie par tous, notamment chez les jeunes, alors qu'encore la moitié des 16-24 ans sont sans travail. Mais la colère des centaines de milliers de manifestants des années 2011 et 2012 a trouvé une expression politique : le nouveau parti anti-austérité Podemos, dirigé par Pablo Iglesias, 37 ans. Fondé début 2014, son ascension rapide a prouvé qu'il y avait de la place pour d'autres couleurs politiques : le violet de Podemos. Puis, un peu plus tard l'orange de Ciudadanos, dirigé depuis 2006 par un autre trentenaire, l'avocat Albert Rivera, et axé sur la lutte contre la corruption et la défense de l'unité de l'Espagne face aux tentations indépendantistes de la Catalogne. «La corruption a toujours existé, mais personne n'avait osé imposer des limites aux grands partis», a expliqué vendredi, lors du meeting de clôture de Ciudadanos à Madrid, une sympathisante enthousiaste de 30 ans, Vanessa Gonzalez, qui n'avait pas voté en 2011 mais semble certaine de le faire cette fois. Le même soir, à Valence, des dizaines de milliers de personnes en liesse acclamaient Pablo Iglesias, professeur de sciences politiques qui porte les cheveux longs en queue de cheval, allié du Premier ministre grec Alexis Tsipras. «Il y a des décennies pendant lesquelles très peu de choses arrivent et parfois des mois ressemblant à des décennies», a-t-il hurlé en évoquant un scrutin «historique» et en plaidant pour un gouvernement centré sur la défense des plus pauvres. R. I. / Agences Vers une nouvelle ère politique l «Les Espagnols définissent aujourd'hui à quoi ressemble la nouvelle ère politique», titre El Pais (centre gauche), le quotidien le plus lu du pays. El Mundo, en pages intérieures, souligne la présence sans précédent depuis 1977 de quatre partis susceptibles d'obtenir plus de 15% des voix. Selon les sondages, le Parti populaire (PP, droite) du chef de gouvernement sortant Mariano Rajoy, largement majoritaire en 2011 avec 45% des voix (186 députés sur 350), n'aurait que quelques points d'avance sur les trois autres mais sans dépasser les 30%. Avec un Parlement morcelé, le vainqueur aura du mal à former un gouvernement. Loin derrière le PP, le Parti socialiste (PSOE) n'est pas sûr de garder sa deuxième place, peinant à dépasser les 20% et talonné par Podemos et Ciudadanos, qui ont déjà émergé lors des régionales et municipales de mai, Podemos, étant associé à des plateformes citoyennes dirigeant Madrid et Barcelone.