Parcours n Vice-président du Brésil depuis 2010, Michel Temer, 75 ans, va assurer l'intérim de la présidence pour 180 jours. C'est la première fois qu'un descendant de l'influente communauté d'immigrants libanais de Sao Paulo accède à la magistrature suprême. Jeudi 12 mai, de nombreux Brésiliens ont fêté la chute de Dilma Rousseff. D'autres se disent écœurés et se sentent vaincus. Mais à Btaaboura, village du nord du Liban dont sont originaires les parents de Michel Temer, on se réjouit à l'idée qu'un enfant du pays devienne président par intérim du Brésil. Bassam Barbar, maire de cette localité de 700 habitants situés à 75 km de Beyrouth déclarait à BBC Brasil : «Avec la télévision, nous suivons de près la situation. Nous savons qu'il est impopulaire et nous sommes au courant des accusations proférées à son encontre. Mais nous serons à ses côtés jusqu'au bout. Si Dieu le veut, le prochain président de Brésil sera Michel Temer». Michel El Mir, un entrepreneur du bâtiment affirmait sans détour au reporter : «Peu m'importe [ce dont il est accusé, NDLR], je le soutiens et le supporte pour qu'il devienne président pour le simple fait d'être d'origine libanaise». Un épilogue provisoire d'une crise politique au Brésil dont le dernier épisode du jeudi 12 mai, le vote du Sénat en faveur de la procédure de destitution de Dilma Rousseff, a ouvert la voie à Michel Temer. C'est dans la petite ville de Tiêté, dans le très conservateur «Interior» de l'Etat de Sao Paulo, que naît en 1940 Michel Miguel Elias Temer Lulia, dont la famille est installée depuis 1924. Son père y acquiert une ferme et cultive du café et de la canne à sucre. Michel Temer, qui s'est rendu à deux reprises à Btaaboura, où une rue et une place portent son nom, évoquait sur son site Internet ce retour aux sources. Avec lyrisme, le vice-président, décrivait son émotion de renouer avec ses origines et de découvrir «ce que me récitaient mes parents : la beauté des montagnes perchées au-dessus de la Méditerranée, celle des villages incrustés dans ses flancs et des cimes recouvertes de neige. [...] Reviennent à ma mémoire les efforts entrepris par des milliers d'immigrants libanais pour s'établir au Brésil». Depuis 1880, plusieurs vagues d'immigration libanaises se sont succédé au Brésil, principalement dans l'Etat de Sao Paulo. Les estimations divergent, mais aujourd'hui 7 à 10 millions de Brésiliens sont des descendants d'immigrants libanais. Alors que le Liban ne compte que 3,5 millions d'habitants. Michel Temer, avocat et professeur de droit constitutionnel, n'est pas le premier homme politique brésilien de premier plan issu de cette immigration. Bien des fils de «Turcos» sont devenus des «docteurs de l'université». Ces 25 dernières années, trois d'entre eux ont administré la ville de Sao Paulo : Fernando Haddad, actuel maire de la mégalopole, Gilberto Kassab son prédécesseur et le très controversé Paulo Maaluf. On peut aussi citer Paulo Skaf, le puissant patron de la Fédération des industries de l'Etat de Sao Paulo (FIESP), héritier d'une entreprise familiale de textile et candidat malheureux au poste de gouverneur de l'Etat de Sao Paulo. Carlos Ghosn, le patron de Renaut-Nissan, né dans l'Etat amazonien du Rôndonia de parents libanais, est lui parti vivre sous d'autres cieux alors qu'il était encore enfant... Critiques des voisins de gauche l Le nouveau gouvernement brésilien par intérim a rejeté hier les critiques de l'Unasur, du Venezuela, de Cuba et de la Bolivie, qu'il accuse de propager des «mensonges» en interrogeant la légalité du processus de destitution qui a écarté Dilma Rousseff de la présidence. Le gouvernement brésilien «rejette fermement les déclarations des gouvernements vénézuélien, cubain, bolivien, équatorien et nicaraguayen, tout comme celles de l'Alba (Alliance bolivarienne pour les peuples de notre Amérique), qui se permettent de donner leur avis et de propager des mensonges sur le processus politique interne au Brésil», a déclaré le ministère des Relations extérieures dans un communiqué. «Ce processus se déroule dans le parfait respect des institutions démocratiques et de la Constitution fédérale», ajoute-t-il. Les gouvernements sud-américains alliés de la présidente de gauche Dilma Rousseff écartée du pouvoir et de son prédécesseur et mentor Luiz Inacio Lula da Silva ont manifesté leur rejet du processus de destitution, qu'ils ont qualifié de «coup d'Etat» et qui pourrait avoir «de lourdes conséquences» selon eux sur la coopération régionale.