Epilogue Enfin, le film Si Mohand U M?hend ! Et à travers cette cinématographie, ce sont la vie et la poésie du rebelle qui sont mises en exergue. La salle Ibn-Zeydoun a abrité, hier, l?avant-première de Si Mohand U M?hend, l?insoumis, un film coréalisé par Rachid Benallal et Liazid Khodja. Le film retrace la vie du poète kabyle, Si Mohand U M?hend, à la fois rebelle et errant, et qui a marqué son époque par sa verve poétique. Une poésie forte, descriptive et lourde de sens. Et c?est grâce à elle que Si Mohand U M?hend, chantre de l?amazighité, est devenu le symbole d?un destin collectif. Son ?uvre, comme sa vie, intimement liées, a été perçue par tous comme un signe et un instrument de libération. Le film dont le dialogue est en amazigh, s?ouvre sur les prémices d?une insurrection qui a été réprimée dans le sang ; ensuite, le film se poursuit en décrivant «la fulgurance nomade de ce poète de génie qui, furtivement, rasait les murs et visitait les villes sans imposer nulle part sa présence, pourtant toujours et partout remarquée et ressentie». Et à travers ces errances, c?est toute «une vie de poésie sevrée au gré des escales, du vin et de paradis artificiels». Le personnage ainsi que sa vie et sa poésie constituent la chair essentielle du film. Sa présence, voire sa prestance occupe d?un bout à l?autre le film. Par ailleurs, cette cinématographie en tamazight s?inscrit dans cette action de promouvoir l?amazighité, donc la culture, la langue et l?histoire berbère. Né entre 1840 et 1850 à Larbaâ-Nath-Irathen et décédé en 1906 à l?hôpital des S?ur-Blanches à Michelet, Si Mohand U M?hend est considéré, voire défini comme le poète de l?errance et de la solitude. Effectivement, le poète passait son existence à aller de ville en ville, de village en village pour dire sa poésie à tous ceux qu?il rencontrait. Il disait en vers sa peine et sa révolte, il faisait entendre sa parole d?une grande force et d?une richesse extrême, d?une esthétique exceptionnelle et d?une poéticité fulgurante. Si Mohand U M?hend exprimait une profonde peine dans sa poésie, une tristesse qu?il ressentait à la fois pour sa personne, seule et nomade, et aussi pour les siens. Douloureusement confronté à une grande misère, Si Mohand U M?hend usait d?un verbe incisif, expressif, d?une verve rebelle pour dénoncer les injustices qu?il a subies, ainsi que les souffrances qu?enduraient les siens, un peuple dépossédé de sa liberté et abusivement exploité par l?administration coloniale. La poésie lyrique de Si Mohand U M?hend, à l?origine orale, a été transmise de génération en génération, grâce à Boufila (1900), et à Feraoun (1955), et grâce aussi à d?autres qui ont travaillé à transcrire l??uvre du mythique poète afin de préserver la parole de ce dernier, ce riche patrimoine culturel, une poésie intense et éloquente. Il est à noter que ce film est un projet de «Djazaïr 2003, une année de l?Algérie en France», mais vu les difficultés financières, il a accusé un retard de plus d?une année. Et après maintes obstacles, le pari est relevé : le film a eu enfin son épilogue.