Résumé de la 2e partie La femme s?est échappée par la fenêtre. Quelques semaines après,un berger l?aperçoit, entièrement nue, sur une crête inaccessible. Aussi incroyable que cela paraisse, cette femme va vivre en solitaire deux années dans la montagne, mangeant des racines, attrapant des oiseaux, dénichant des nids, pêchant à la main dans les torrents, se réfugiant l'hiver dans des grottes avec des ours qui partagent avec elle leur nourriture, en toute confiance. La conclusion du juge de paix est que la malheureuse est retournée à l'état primitif de nos lointains ancêtres, retrouvant au fond de son subconscient les gestes de survie. Le plus extraordinaire est cette véritable amitié avec les ours, des animaux qui, à l'époque, étaient férocement chassés par l'homme et le lui rendaient bien. Malgré ses efforts, Vergnier ne peut obtenir aucun renseignement sur son identité et celle de son mari. Dès qu'il aborde ce chapitre, la «sauvageonne» se met à pleurer ou tombe dans une hébétude totale. Alors, estimant qu'il a fait son devoir, le juge de paix de Vic-Dessos décide de livrer sa pensionnaire à l'administration. Le plus sage n'est-il pas de la placer dans un asile ? Or, à l'époque,il n'en existe pas dans le département de l'Ariège, et celui de Toulouse refuse de recevoir les malades d'un autre département. Bref, l'administration, soucieuse de se débarrasser d'un fardeau qui l'encombre, accepte de prendre l'inconnue sauvage à sa charge, mais pour l'envoyer tout simplement en prison à Foix. Incroyable. Personne n'a l'idée de la laisser retourner dans sa montagne, où elle ne faisait de mal à personne et où elle avait réussi à s'adapter. Après tout, vit sa vie qui veut et comme il veut, la liberté des uns étant admise dans les limites où elle ne gêne pas celle des autres. Mais non. Laisser libre une sauvageonne, cela ne se fait pas. Les êtres sauvages doivent aller en cage. La prison de Foix est, à l'époque, dans le vieux château féodal. La «sauvageonne» y est enfermée entre quatre murs, sans air ni lumière, et se met à hurler de désespoir. Pendant des heures, ses cris retentissent dans les couloirs du château, et rien ni personne ne parvient à la faire taire. Elle hurle à la mort et au bout de quelques jours, le gardien, excédé, la fait conduire dans l'escalier du donjon où il l'enferme entre deux portes, comme ça, sur les marches, dans un espace d?un mètre. Et comme, dans la nuit, on entend encore au loin ses lamentations, l'administration de la prison décide d'utiliser les tristement célèbres oubliettes du château fort. Ni plus ni moins. On la jette comme un paquet dans ce trou noir et glacé dès le lendemain. Près d'elle, le gardien dépose du pain et de l'eau, puis referme la trappe. L'essentiel pour lui est de dormir tranquille. Mais quelques jours plus tard, lorsque le geôlier vient renouveler ses vivres, la bête sauvage est morte. Elle n'a pas supporté la cage sans lumière, le froid, le désespoir ; sa folie a atteint le maximum de la souffrance supportable pour un être humain. Ainsi la «sauvageonne» des Pyrénées est-elle morte avec le secret de son identité. Aujourd'hui encore, personne ne sait qui elle était et d'où elle venait. Peut-être avait-elle, quelque part dans son autre vie, des enfants, dont l'un d'eux est peut-être en train de lire sans le savoir l'histoire de son ancêtre. Une lamentable histoire. Un triste dénouement que cette mort dans un trou imaginé par les hommes pour une femme qui avait passé deux hivers dans la montagne grâce à l'hospitalité, à la chaleur, à la compréhension de ces inférieurs que l'on appelle des bêtes.