Conséquence Alors que les sondages les mettent toujours au coude à coude, les deux hommes ont beaucoup à perdre avec cette incursion de Ben Laden dans la campagne électorale. Les réactions des deux candidats à cet enregistrement n?ont pas tardé. A peine une heure après la diffusion des images, le démocrate et le républicain ont réagi chacun sur un tarmac d'aéroport, dès la descente d'avion de la dernière étape de leur interminable tournée électorale. En Floride, à West Palm Beach, John Kerry a promis, s'il était élu, de «traquer et de détruire» Oussama ben Laden. «Ce sont des barbares. Je ne reculerai devant rien pour poursuivre, capturer ou tuer les terroristes où qu'ils soient, quoiqu'il en coûte», a-t-il ajouté, à moins de 100 heures de l'élection. A Toledo, en Ohio, le Président sortant a assuré que «les Américains ne seront ni intimidés ni influencés par un ennemi de notre pays». «Je veux aussi dire aux Américains que nous sommes en guerre contre ces terroristes et je suis sûr que nous gagnerons», a-t-il souligné. «Je suis sûr que le sénateur Kerry est d'accord avec cela», a-t-il ajouté. Le candidat démocrate n?a évidemment pas laissé passer cette occasion de critiquer vertement son adversaire républicain en déclarant, dans un entretien à une télévision de Floride, qu'il regrettait que «lorsque George W. Bush en a eu l'occasion en Afghanistan à Tora Bora, il n'ait pas utilisé nos ressources pour pourchasser et tuer Oussama ben Laden, mais a chargé des chefs de guerre de ce travail». Les analystes politiques tentaient ainsi de savoir auquel des deux candidats cette apparition de Ben Laden allait profiter : à Bush, grâce à un réflexe de peur et de rassemblement sous la bannière du président sortant ? Ou à Kerry, devant le constat d'échec de George W. Bush qui clame avoir porté la guerre contre le terrorisme jusqu'en Irak, mais n'a pas réussi à en débusquer le chef ? Le démocrate doit à tout prix prouver qu'il a la carrure d'un dirigeant capable de mettre fin au terrorisme, lui que M. Bush a passé la campagne à dépeindre comme un homme faible, changeant facilement d'avis. «Je pense que je peux mener une guerre contre le terrorisme plus efficace que George Bush», insistait d'ailleurs Kerry dans la soirée sur une télévision locale de Floride. Le Président, lui, allait avoir du mal à faire la fête avec Arnold Schwarzenegger, ex-Terminator aujourd'hui gouverneur républicain de Californie, au moment où Ben Laden le nargue depuis son repaire caché. Cette vidéo devrait en tout cas l'arranger en faisant passer au second plan des affaires qui le plaçaient sur la défensive, comme celle des 330 tonnes d'explosifs disparues en Irak, alors qu'elles auraient été sous contrôle américain. L'apparition d'Oussama ben Laden vendredi «pourrait jouer pour un côté comme pour l'autre», estime Michael O'Hanlon, expert pour les questions de défense au Brookings Institution de Washington, estimant toutefois qu'un réflexe de crainte des électeurs pourrait éventuellement favoriser Bush. Selon Allan Lichtman, professeur en sciences politiques à l'American University, «tout ce qui détourne le débat de l'Irak est bon pour Bush», ajoutant également : «Il y a un vieil adage selon lequel on ne change pas de cheval pendant une bataille.»