Pérégrinations Le théâtre est né en Algérie dans un contexte colonial. Le passage, en 1921, d?une troupe égyptienne a permis le regroupement de jeunes amateurs au sein d?associations culturelles et de troupes indépendantes. Au départ, c?étaient des pièces théâtrales étrangères qui étaient jouées en arabe classique, mais ce n?est qu?à partir de 1926 que des comédies furent écrites dans le dialecte algérois. Dès les premières années, l?activité théâtrale s?est manifestée à travers l?affirmation de soi face à l?autre (le colonisateur) ; elle était considérée dans un discours de résistance contre le colonialisme. D?abord, c?étaient des groupements, çà et là ; plus tard, en 1958, en pleine Guerre de Libération nationale, la troupe nationale a été créée, à Tunis, par l?organisation clandestine du FLN. Au lendemain de l?Indépendance, un certain 8 janvier 1963, le Théâtre national algérien (TNA) a été institutionnalisé, créant une troupe permanente et professionnelle ; celle-ci a permis un extraordinaire regroupement de potentiels artistiques. Le TNA se devait de définir les orientations du théâtre, propager l?activité théâtrale au sein des masses populaires, favoriser son travail son développement par un travail d?étude, de formation, de promotion et de sélection des ?uvres théâtrales, et enfin gérer une troupe itinérante. L?entreprise connaît un réel développement de 1963 à 1972. A partir de 1970 et jusqu?à 1975, ont été créés les théâtres régionaux. Le Théâtre régional d?Oran, à l?époque dirigé par Abdelkader Alloula, abritait, à partir de 1972, un certain nombre d?actions ayant pour seul objectif d?inscrire l?art théâtral dans la ville afin d?être plus près des préoccupations de la population. De nouveaux modes de production par l?écriture et la mise en scène collective apparaissent en tant que cadre de recherche, de réflexion, de prospection, de débat et de création artistique. Le théâtre régional d?Oran évolue sous deux dynamiques : aller vers le public et animer l?ensemble de la vie artistique. Abdelkader Alloula a pu donc dégager ce que l?on peut appeler «la politique des ponts» qui consistait à aller vers des publics divers et nouer des liens avec les institutions les plus variées en vue de les sensibiliser à l?activité théâtrale. Les troupes se déplaçaient non seulement dans les villes, mais utilisaient ces villes comme bases de rayonnement vers des villages plus reculés, ce qui élargissait et approfondissait le circuit de diffusion. Or ce pont fut rompu. Aujourd?hui et depuis plusieurs années, le théâtre algérien souffre d?un véritable handicap de diffusion en raison de l?inexistence de moyens financiers pour assurer l?action artistique à travers le pays. Les déplacements des troupes théâtrales, donc la diffusion du produit théâtral, exigent des moyens financiers importants, qui relèvent de «l??uvre pharaonique». L?absence de structures dotées d?un statut précis, en vue d?orienter la pratique théâtrale selon des standards internationaux fait stagner le 4e Art algérien dans un immobilisme certain. L?activité théâtrale est loin d?être continue, et la production n?est certainement pas dynamique ni prolifique. Un produit, une fois réalisé, est présenté au public, puis il rejoint aussitôt le répertoire, voire les archives. Rare, voire très rare est un spectacle qui «tourne».