Présidentielle Rassembleur ou diviseur de la mouvance islamiste ? A quelques encablures du scrutin, le président de Wafa entretient le suspense. Son nom colle aux péripéties du système. Détenteur du portefeuille de l?Education nationale sous le règne de Boumediene, chef de la diplomatie sous Chadli, membre du bureau politique du FLN, candidat à la présidentielle en 1999, avant de quitter l?arène avec le fameux «six» pour dénoncer la fraude, la veille du jour J, Taleb Ibrahimi aura pratiquement tout vu. Né en 1932, ce fils d?un des membres fondateurs de l?Association des oulémas algériens ne recule que pour mieux sauter, dit-on. L?homme annonce son retour en grande pompe. Les scellés des bureaux de Wafa levés, il sait pertinemment que l?agrément de son parti n?est qu?une simple formalité. Finis les trente-trois mois de calvaire. Son champ de man?uvre demeure une mouvance islamiste en ébullition et en quête effrénée d?un homme dont le charisme devra bien charmer l?électorat. Tantôt orientaliste, tantôt moderniste, souvent centriste, Ibrahimi se présentera dans les starting-blocks avec l?éternelle étiquette d?islamiste BCBG et sans doute avec les atouts d?un politicien aguerri, sûr de ses atouts et donc franchement gênant pour les autres concurrents. L?ex-FIS parti pour ne plus revenir, surtout avec «l?exil» de Abassi Madani et la mise en liberté sans tapage médiatique de Ali Benhadj, le MSP loin d?opérer sa mue après la disparition de Nahnah, El-Islah, otage du fratricide qui l?oppose à Ennahda, l?islamiste algérien peut facilement trouver en Taleb le messie, le candidat du «consensus» d?autant qu?il a le profil d?un présidentiable que l?armée ne saurait évidemment pas éjecter de la course si l?on se réfère à l?aveu de taille du général Lamari lorsqu?il a annoncé que «l?armée n?est pas contre l?avènement d?un candidat islamiste». Dans son nouveau costume de rassembleur, Taleb aura certainement de fortes chances d?acquérir le satisfecit qu?il souhaite et revenir aux affaires de l?Etat avec une base populaire recyclée, mais tout de même solide. Mais l?homme peut aussi revenir sur scène dans la peau d?un «diviseur» au sein d?une mouvance islamiste déjà hétéroclite. D?abord parce que Wafa ne sera, le cas échéant, qu?un parti vivant ses balbutiements et donc loin des feux de la rampe ensuite parce qu?il serait, tout de même, très difficile à un politicien, fût-il islamiste, de ratisser large et d?impressionner par un même langage un électorat islamiste fortement dispersé. Un Taleb présent sur l?échiquier sans tambour ni trompette augmentera incontestablement les chances d?un autre candidat, Bouteflika en l?occurrence, qui n?aura de la sorte plus besoin du scénario du 14 avril 1999 pour briguer un second mandat. Autant dire aujourd?hui que la bonne balle tourne chez Wafa.