?uvre Ali Ghanem, cinéaste connu surtout pour Une Femme pour mon fils, s?attelle à achever son dernier long métrage. Ce film, qui sortira à la fin de l'année 2005, traite de l?émigration, un sujet déjà abordé dans Mektoub ? (1969) et L?autre France (1975). Chacun sa vie vient donc clore la trilogie cinématographique entamée par le cinéaste. Le réalisateur parle du déracinement de toute une génération qui ne connaît d'autre pays que celui indéfiniment appelé «pays d'accueil». La trame du film, une coproduction avec l'Entv, tourne autour de la vie de Rachid, un émigré de la précédente génération à la retraite, qui a construit une belle maison dans son village natal, en Algérie, dans l'espoir de finir ses jours au sein des siens. Mais ce rêve tourne vite au cauchemar lorsque ses enfants ? cette fameuse génération beur ? refusent de le suivre et préfèrent rester dans leur «pays d'accueil». Ne se contentant pas de l'aspect du drame social et humain qui se dessine, Ali Ghanem affirme vouloir aller aussi loin que le lui permet le langage cinématographique pour mettre en relief la tragédie d'une famille victime des vicissitudes de l'histoire, déracinée et partagée entre deux cultures différentes, et poser les questions liées aux conflits de générations, à l'acculturation et à l'intégration. Pour ce faire, le cinéaste dit avoir rompu, de façon sensible, avec «le misérabilisme culturel et social qui a longuement marqué les films réalisés en France sur ce sujet». «J'ai essayé, à travers cette fiction, de dépasser la démarche classique induite par le néoréalisme italien qui se contente souvent de décrire des situations pitoyables sans jamais proposer de perspectives de combat ou de lutte sociale pour s'intégrer dans la société», précise-t-il. Partant de l'idée que le phénomène de l'émigration est avant tout un héritage colonial, Ali Ghanem dit refuser de «tremper dans le spectaculaire et le commercial en recourant à des effets faciles ou à produire des films tracts», d'autant que les producteurs européens ? français en particulier ? selon lui, s'intéressent uniquement à une certaine écriture littéraire et cinématographique qui met en relief des images et stéréotypes répondant à certains regards et à un certain esprit critique égocentrique. Une pléiade d'acteurs issus des deuxième et troisième générations d'émigrés est réunie dans cette production, dont Ahmed Taïbi dans le personnage de Rachid, aux côtés de Chafia Boudraâ.