Décor Comme la nuit vient de tomber, on a allumé des bougies (il n?y a pas d?électricité) et des femmes, emmitouflées dans leurs châles, récitent des prières. Bien que située dans le riche Minas Gerais, la ville de Congonhas do Compos, au Brésil, est, dans les années cinquante, une ville pauvre, comptant nombre de bidonvilles où s?entassent des milliers d?hommes, de femmes et d?enfants. La plupart ont quitté les campagnes dans l?espoir de trouver un travail décent, mais la misère les a inexorablement rattrapés et ils sont confrontés à des conditions épouvantables. Beaucoup vivent d?expédients ou de vols ; les filles, quand elles n?arrivent pas à se louer dans les maisons bourgeoises, s?adonnent à la prostitution. L?alcool et la drogue font des ravages ainsi que des maladies provoquées par la malnutrition et l?insalubrité des lieux. Ici, les quelques centres de santé qui existent ne peuvent répondre à la demande et, de toute façon, les médicaments coûtant trop cher, les gens ne se soignent pas. Dans un taudis justement, une femme, étendue sur un lit se meurt. Très pâle, le visage crispé, respirant difficilement, elle semble souffrir. Et pourtant elle est jeune, très jeune pour mourir : à peine une trentaine d?années. Son mari, à son chevet, semble impuissant. Ses enfants, assis par terre, au pied du lit, pleurent doucement. Les voisins ainsi que des parents et des proches sont venus soutenir la famille. Comme la nuit vient de tomber, on a allumé des bougies (il n?y a pas d?électricité) et des femmes, emmitouflées dans leurs châles, récitent des prières. Un homme tire le mari par la manche et l?emmène dans un coin. ? Tu l?as emmenée au centre de santé ? ? Oui, dit le mari. ? Et alors ? Que t?a-t-on dit ? ? C?est une vilaine tumeur, dans la matrice? ? Ils peuvent l?opérer? ? Ils ont dit que c?était inutile, qu?elle est perdue de toute façon? ? Ils auraient dû essayer quand même ! ? Maintenant, c?est trop tard, elle va mourir ! L?homme ne dit rien et le mari retourne à sa place. La jeune femme ouvre les yeux et regarde autour d?elle. ? J?ai mal, dit-elle. Une vieille femme se lève et va chercher un bol dans la cuisine, attenante à la pièce. ? Tiens, lui dit-elle, bois, ça va te calmer la douleur. Elle lui tient la tête et la fait boire. Elle avale deux gorgées du liquide et retombe sur l?oreiller, épuisée. ? J?ai mal, gémit-elle encore. Son visage se crispe et elle ferme les yeux. La respiration devient, de nouveau, saccadée, elle perd connaissance. ? Il faut faire venir un prêtre, dit quelqu?un. Un homme se lève et sort. (à suivre...)