Terme n Le Président français rattrapé par sa santé, c'est la fin d'une légende. Celle d'un Chirac indestructible. Jacques Chirac est de ceux qui pensent qu'il faut nier la maladie et qui ne se choquent pas que même les chefs d'Etat s'en accommodent comme ils peuvent. Il n'a jamais voulu voir l'affaiblissement de Georges Pompidou, se fâchant même quand on osait devant lui évoquer la gravité de son mal. Il a admiré la manière dont François Mitterrand, à défaut de l'apprivoiser, a instrumentalisé son cancer en assumant ses fonctions jusqu'au dernier jour. Arrivant à l'Elysée après les années de mensonges de son prédécesseur, il a promis de «donner toute information significative sur son état de santé». Il n'a pas menti. Mais, jusqu'ici, il était «un roc», comme disait sa femme, Bernadette Chirac, dont la force emportait toutes les fatigues. Non que Jacques Chirac, si attentif à la souffrance des autres, ne soit pas conscient de la précarité de la vie. Son père s'est «effondré, debout» le 23 juin 1968, victime d'une crise cardiaque. Et lui-même a frôlé la mort ou la paralysie, le 26 novembre 1978, sur une route verglacée de Corrèze. Pour la première fois, il découvrait la souffrance physique. Mais il opposait à la fragilité de l'existence sa propre solidité. Sans être tout à fait remis de cet accident, il sillonnait la France pour les élections européennes de 1979 avec ses cannes anglaises, les traits tirés par la douleur. Chirac sait crâner. S'il a eu, depuis qu'il est à l'Elysée, de vrais gros coups de fatigue ? jusqu'à sembler «usé» à Lionel Jospin en 2002 ?, il a toujours joui d'une invulnérabilité devenue légendaire, masquant et détestant ses faiblesses. La révélation de sa surdité mit en émoi l'Elysée en 2004 : «Vous en faites de belles, Madame», s'indigna Bernadette Chirac auprès de Roselyne Bachelot, qui avait osé évoquer cette défaillance présidentielle. Depuis quelques jours, Jacques Chirac, même s'il n'a subi qu'une alerte mineure, n'est plus insubmersible. Il a eu de la chance sans doute, mais il est maintenant comme tout le monde. Il a «l'âge de ses artères», auxquelles il a toujours fait subir un régime qui défie les règles de l'hygiène : pas de sport, des calories, du stress et ? naguère ? du tabac ! «Il faut qu'il se repose», disent ses vieux amis.