Contexte n Au moment où une loi, votée en février dernier par les députés français, tente de réhabiliter la colonisation, il est bon de revenir sur l?un des épisodes les plus sombres de cette occupation. Alger, en 1830, n?est pas la grande métropole que nous connaissons aujourd?hui, mais déjà, le voyageur, qui l?aborde par la mer, est agréablement surpris par ses maisons blanches qui semblent dégringoler du haut de la colline où elles sont construites. En 1830 aussi, il y avait le canons, tournés du côté de la mer, non qu?Alger soit hostile, mais c?était une ville convoitée que bien des puissances voulaient réduire ou prendre : il fallait donc qu?elle se défende, qu?elle soit constamment sur le qui-vive pour assurer sa sécurité? En 1830, Alger était déjà une vieille ville puisqu?elle était plus que millénaire ! Les Romains l?appelaient Icosium, mais elle existait déjà plusieurs siècles avant les Romains, puisque les Phéniciens venaient y mouiller leurs ancres, aux Ve et VIe siècles avant J.-C. et même bien avant ! D?ailleurs, son nom antique d?Icosium viendrait, selon les historiens, du phénicien Ikosim et signifierait «île aux mouettes» à cause de l?abondance de cet oiseau dans les nombreux îlots qui entouraient alors le site d?Alger. Dans l?antiquité, Icosium était peuplée de Berbères romanisés et sera élevée, sous le règne de Vespasien, au rang de colonie. Le prince berbère Firmus, en guerre contre les Romains, s?empare de la ville en 372 de l?ère chrétienne, et elle sera le théâtre de nombreux combats puis tombera en ruines. Elle subira par la suite l?occupation vandale. L?évêque d?Icosium, Victor, sera cité parmi les évêques numides qui assisteront, en 484, au colloque de Carthage organisé par le roi Hunéric. Puis la ville ne sera plus citée : elle aurait été ruinée au Ve siècle, sous les coups répétés des envahisseurs? Quand les musulmans arrivent, ils ne trouvent qu?une citée ruinée et les grands géographes arabes comme Ibn Khuradadhbih ne la citent pas ; quand El-Bekri le fait, c?est pour parler de ruines. La région d?Alger était alors occupée par une tribu berbère sanhadjienne, les Banû Mezghena (d?où l?ancien nom de la ville : Djaza?ir Banû Mezghana), à laquelle succédera une autre tribu berbère, les Beni Mellikèche. C?est le prince ziride Bologgin Ibn Ziri qui va donner, à la fin du Xe siècle, sa chance à Alger, en fondant, sur l?ancien site, une ville nouvelle. Bologgin disposait déjà d?une capitale, Achir, dans le massif du Titteri, mais sans doute voulait-il, pour son royaume, un débouché sur la mer. C?est à cette époque qu?Alger prend le nom d?El-Djazaïr (les îlots) par référence aux îlots qui l?entouraient alors et dont vont dériver les noms occidentaux de la ville : le français Alger (d?abord prononcé Aljerd), l?espagnol Argel, l?anglais Algiers etc. Avec les Zirides, Alger devient une ville prospère. Selon le géographe arabe Ibn al-Hawqal, le commerce et l?agriculture étaient florissants : Alger, écrit-il, produisait de telles quantités de miel, de beurre et de figues qu?elle en exportait une bonne partie ! Concurrencée par Béjaïa, devenue la capitale des Hammadites, Alger connaît un certain déclin. Puis l?arrivée d?Andalous chassés d?Espagne va l?aider à retrouver progressivement une place, au plan économique comme au plan intellectuel. Alger va aussi s?ouvrir sur le monde, rassemblant des gens d?origines les plus diverses ; sa population d?origine, compte des Berbères restés berbérophones ou arabisés, des Andalous, des Italiens, des Espagnols? Puis, à partir du XVIe siècle, les Turcs vont s?y installer et dominer la cité? (à suivre...)