Il était une fois un roi ? il n?y a de roi que Dieu ? qui était très malheureux de ne pouvoir avoir d?enfant. Mais ce n?était pas faute de s?être marié. Il en était à sa sixième épouse ! Mais aucune de ces reines n?avaient pu lui donner un héritier. Chaque lundi, ce roi, passionné de chasse à la perdrix, s?en allait à cheval vers la forêt voisine. A la lisière de la futaie, il y avait dans une petite chaumière, une veuve qui vivait les yeux fixés sur son unique fille, Ouarda. Ouarda, en arabe, veut dire rose ; et le teint de la jeune fille, de jour en jour, prenait la couleur, la pureté et l'éclat de la fleur dont elle portait le nom. Son abondante chevelure qui la couvrait d?or jusqu?à la taille était, à elle seule, la plus belle des parures. Le jour de ses vingt ans, Ouarda dit à sa mère : «Mère, je voudrais, si tu le permets, être la septième épouse du roi.» La pauvre femme, surprise, tomba à la renverse, elle eut beau dire à sa fille qu?elles étaient trop pauvres pour prétendre à une telle alliance, elle eut beau lui rappeler que déjà six reines vivaient cloîtrées dans le harem, rien n?y fit. La jeune fille, contrariée, finit par tomber malade. La pauvre mère, de guerre lasse, fit venir Ma Settoute et lui demanda son aide : «Le roi passe devant ma maisonnette chaque lundi matin pour aller dans la forêt chasser la perdrix ; de sa fenêtre, ma fille l?a aperçu et, depuis, elle s?est mis en tête de devenir sa septième femme !». Ma Settoute répliqua : «Notre roi ne trouvera pas plus belle reine que ta fille, la bien-nommée, c?est vraiment une rose incarnée ! Je reviendrai bientôt avec tout ce qu?il nous faut.» En effet, le lundi matin, Ma Settoute revint, elle demanda aussitôt une grande cuvette que la pauvre mère s?empressa de lui donner. Elle y versa des bouteilles entières d?eau de rose et y fit mousser du savon. Quand elle entendit s?approcher le roi et sa suite, elle déversa sur le seuil de la maisonnette cette eau savonneuse et parfumée. Elle procéda ainsi chaque lundi. Un matin, le sultan, intrigué, frappa à la porte de la cabane et demanda à la vieille femme : «Bonne mère, je voudrais savoir, pourquoi tu jettes dehors ce divin parfum ?» Ma Settoute fit l?embarrassée. Le roi, méfiant, s?emporta et somma les deux femmes de s?expliquer. «Ce n?est pas du parfum», bredouilla Ma Settoute, confuse. «Chaque lundi matin, ma jeune maîtresse se lave dans cette baignoire, dont, après, je déverse le contenu sur le seuil.» Le roi se dit : «Si l?eau du bain n?est que divine senteur, la baigneuse ne peut être, elle-même, qu?une sublime fleur !» Puis, s?adressant à la pauvre mère, il reprit plus haut : «Je veux voir tout de suite ta fille !» Settouta, qui s?attendait à une telle requête, avait déjà baigné, coiffé, habillé et surtout parfumé la jeune fille. Quand Ouarda parut, le roi en tomba éperdument amoureux. «Petite mère, s?écria le roi, devant Dieu et les hommes, je veux faire de ta fille mon épouse car je crois déjà l?aimer de toute mon âme !» Puis, se tournant vers Ouarda, il murmura : «Si, bien entendu, elle y consent !» Ouarda, rougissante, répondit au sultan : «Si ma mère accepte, je consentirai à vous épouser, majesté, mais à la condition que vous me permettiez de passer ma nuit de noces à prier dans le jardin jusqu?au petit matin.» Le roi, heureux, s?exclama : «Qu?importe une nuit quand on a toute la vie !» (à suivre...)