C'est à partir de Révolution française que l'ordre de Malte commença à perdre ses droits et ses privilèges. En 1791, l'Assemblée nationale, considérant l'ordre de Malte comme un souverain étranger, décréta que les biens qu'il possédait en France seraient soumis à toutes les charges fiscales imposées aux propriétaires nationaux, mais un autre décret du 19 septembre 1792, supprimant les ordres monastiques et confisquant leurs biens, lui fut appliqué. En 1798, lors de l'expédition d'Egypte, le général Bonaparte se fit livrer Malte moyennant une pension payée au grand maître de l'ordre, Hompesch, qui se retira à Trieste et abdiqua peu de temps après en faveur de l'empereur de Russie, Paul ler, qui fut reconnu grand maître le 27 octobre 1798 ; Alexandre, qui lui succéda, refusa la grande maîtrise. Mais, après un siège de deux ans, les Anglais réussirent à s'emparer de l'île (8 septembre 1800). En 1802, le traité d'Amiens stipula que l'île de Malte serait rendue à l'Ordre, mais cette stipulation ne fut pas mise à exécution. Les Anglais se virent reconnaître leur souveraineté sur Malte par le traité de Paris (1814). Ils ne s'en dessaisiront qu'en 1964, date de l'indépendance de Malte (21 septembre). Jean Tommasi, nommé en 1802 et mort en 1805, fut le dernier grand maître de l'ordre de Malte, d'une série ininterrompue depuis le XIe siècle; ses successeurs n'eurent, au cours des décennies suivantes, que le titre de lieutenants du magistère. Le pape Léon XII transféra le siège de l'Ordre dans les Etats romains le 12 avril 1827 et Grégoire XVI l'installa définitivement à Rome en 1831. Après cette date, les royaumes lombardo-vénitien, des Deux-Siciles, de Prusse, les duchés de Parme, de Modène et de Lucques reconnurent et rétablirent l'ordre de Malte dont les membres furent divisés en profès ou chevaliers de justice qui doivent justifier de huit quartiers de noblesse, en chevaliers d'honneur ou de dévotion qui font les mêmes preuves, et en chevaliers de grâce magistrale qui ne font pas de preuve ; puis viennent les chapelains conventuels, les servants d'armes, prêtres, frères d'obédience et donats. Quatre dames, dont l'ex-impératrice Eugénie, faisaient partie de l'ordre. Le 29 mars 1879, la dignité de grand maître fut rétablie en faveur d'un gentilhomme tyrolien, Giovanni-Battista Ceschi di Santa Croce, qui était lieutenant du magistère depuis 1872. L'Autriche envoya un ambassadeur à ce grand maître et la Russie, l'Angleterre et l'Allemagne traitèrent avec lui sur le même pied qu'avec les souverains. L'Ordre fut convoqué, avec toutes les autres puissances, à la conférence de Genève. Mais déjà, ayant perdu son caractère militaire et son assise territoriale de Malte, il avait perdu aussi tout poids politique véritable. Au XIXe siècle, le cardinal Lavigerie eut la pensée de rendre l'ordre de Malte à la vie militaire en l'employant en Afrique pour la lutte contre l'esclavage, mais ce projet n'eut pas de suite. Les chevaliers de Malte existent toujours. Le but de l'ordre est, aujourd'hui, exclusivement humanitaire. Sa direction spirituelle est exercée par le grand pénitencier de l'église romaine. Le ruban de Malte est noir.