Résumé de la 8e partie n Scharkân, qui assistait à la lutte entre les deux femmes, priait pour la victoire de la plus jeune. Et voici que du premier entrelacement, légère, la jeune lutteuse se dégagea et de sa main gauche, saisit la vieille par le cou et enfonça sa main droite entre ses cuisses et la souleva en l'air et la rejeta à ses pieds par terre, où la vieille retomba lourdement sur le dos, en se tordant. Alors la vieille souleva un nuage de poussière et dont l'autre monta en colonne fumante vers le ciel. Et la lune en haut éclairait toute la scène ! Alors Scharkân se mit à rire considérablement et en silence et tellement qu'il tomba à la renverse. Mais il se releva et se dit : «Vraiment cette vieille mérite bien ce nom de Mère-des-Calamités ! C'est, je le vois, une chrétienne, comme, d'ailleurs, la jeune victorieuse et les dix autres femmes également.» Puis il s'approcha un peu plus de l'endroit de la lutte et vit la jeune lutteuse jeter un grand voile de soie fine sur la nudité de la vieille et l'aider à remettre ses habits et lui dire : «O ma maîtresse, excuse-moi car, si j'ai lutté avec toi, c'était pour déférer à ta demande ; mais tout ce qui s'est ensuivi n'est pas ma faute ; et si tu es tombée, c'est que tu m'as glissé des mains. Mais, grâce à Allah, tu n'as aucun mal.» Mais la vieille ne répondit rien, et pleine de confusion, s'éloigna rapidement et disparut dans le monastère. Et sur la pelouse il n'y avait plus que le groupe des dix jeunes filles entourant leur jeune maîtresse. Et Scharkân dit en son âme : «Quelle que soit la destinée, elle sert toujours à quelque chose ! Il était écrit que je devais m'endormir sur mon cheval et me réveiller ici-même, et cela pour ma bonne chance. Car j'espère bien obtenir cette désirable lutteuse aux muscles parfaits et ses dix non moins enivrantes compagnes !» Et il remonta sur son cheval seglaoui-jedrân et le poussa dans la direction de la pelouse ; et il tenait en l'air son sabre dégainé ; et le cheval partit rapide comme le trait lancé par l'arc bandé d'une puissante main. Et voici Scharkân sur la pelouse, s'écriant : «Allah est le seul grand !» A cette vue, la jeune femme vivement se leva, courut vers la rive du fleuve qui était large de six bras, et d'un bond agile fut sur la rive opposée, debout sur ses deux pieds. Et d'une voix haute mais fine, elle s'écria : «Qui donc es-tu, toi qui oses ainsi venir troubler nos ébats solitaires et qui ne crains pas de fondre sur nous l'épée haute, comme un soldat d'entre les soldats ? Dis-nous tout de suite d'où tu viens et où tu vas ; et sois véridique dans tes paroles, car le mensonge te sera nuisible ; et sache bien que tu es dans un endroit d'où sortir sauf est pour toi une chose fort douteuse ; car il me suffit de jeter un seul cri pour que tout de suite accourent à notre aide quatre mille guerriers chrétiens, accompagnés de leurs chefs ! Dis-nous donc ce que tu veux. Et si tu es simplement égaré dans la forêt, nous te ferons retrouver ta route. Parle !» Lorsque Scharkân eut entendu les paroles de la belle lutteuse, il lui dit : «Je suis un homme étranger, un musulman d'entre les musulmans. Je ne me suis point égaré, au contraire. Je suis simplement à la recherche de quelque butin ! Et justement voici dix jeunes esclaves qui, par Allah ! me conviennent fort ! Et si elles le veulent, je les emmènerai avec moi.» Alors la jeune femme dit : «Insolent soldat ! sache que cette pâture dont tu parles n'est pas encore prête à te tomber entre les mains ! Et, d'ailleurs, tel n'a pas été ton but et, malgré mon avis, tu viens de mentir !» (à suivre...)