Résumé de la 28e partie n Enfermée dans ses appartements, refusant de voir qui que ce soit hormis ses esclaves, Abriza s?aperçut un jour qu?elle était enceinte. Alors son chagrin augmenta considérablement et le monde se rétrécit devant son visage ; et elle ne voulut point écouter les paroles consolatrices de Grain-de-Corail ; puis elle lui dit : «O Grain-de-Corail, c'est moi seule qui me suis mise dans cet état, en me comportant mal vis-à-vis de moi-même, en quittant mon père et ma mère et mon royaume ! Et voici que maintenant je suis dégoûtée de moi-même et de la vie, et mon courage s'est évanoui et ma force s?en est allée ! Avec ma virginité, j'ai perdu toute ma fermeté et ma grossesse me rend incapable de résister au choc d'un enfant. Et je ne pourrais même plus tenir les rênes de mon coursier, moi Abriza, la jeune Abriza, jadis pleine de flamme et de vigueur ! Que faire désormais ? Si j'accouche dans ce palais, je serai un objet de risée pour toutes les musulmanes qui l'habitent et qui sauront la manière dont j'ai perdu ma virginité. Et si je retourne chez mon père, avec quelle figure oserai-je le regarder ! Oh ! comme elles sont vraies ces paroles du poète : ?Ami ! sache bien que, dans le malheur, tu ne trouveras plus ni parents, ni patrie, ni maison hospitalière !?» Alors Grain-de-Corail lui dit : «O ma maîtresse, je suis, moi ton esclave, et je reste tout entière à tes ordres et sous ton obéissance ! Ordonne !» Elle répondit : «Alors, O Grain-de-Corail, écoute bien ! Il faut absolument que je sorte de ce palais sans que personne puisse s'en douter, et que je retourne chez mon père et chez ma mère, malgré tout ; car vois-tu, ô Grain-de-Corail, si le cadavre vient à sentir, il est à la charge des siens ! Et je ne suis plus qu'un corps sans vie. Mais ensuite, qu'Allah accomplisse Sa volonté !» Et Grain-de-Corail répondit : «O reine, ce que tu désires faire est le mieux !» Puis elle se mit, dès l'instant, à commencer secrètement les préparatifs du départ. Mais elles durent attendre l'occasion favorable qui, bientôt, se présenta et ce fut le départ du roi pour la chasse et le départ de Scharkân pour les frontières de l'empire où il avait à inspecter les places fortes. Mais tandis qu'elles subissaient ce retard, le temps de l'accouchement était devenu plus proche et Abriza dit à Grain-de-Corail : «Il faut que nous partions cette nuit même ! Mais que faire contre la destinée qui m'a marquée au front et a écrit que, dans trois ou quatre jours, mon accouchement devait avoir lieu ! Partons tout de même, car je préfère tout, plutôt que d'accoucher dans ce palais. Il te faut donc nous trouver un homme qui veuille nous accompagner dans notre voyage, car je n'ai plus la force de tenir moi-même l'arme la plus légère.» Et Grain-de-Corail répondit : «Par Allah ô ma maîtresse, je ne connais qu'un seul homme capable de nous accompagner et de nous défendre, c'est le grand nègre Morose, l'un des nègres du roi Omar Al-Némân ; car je l'ai bien des fois obligé et bien des fois je lui ai donné des gratifications ; et de plus, il m'a dit qu'autrefois il avait été brigand et coupeur de grands chemins. Et comme c'est lui qui est le gardien de la porte de notre palais, j'irai le trouver et je lui donnerai de l'or et je lui dirai qu'arrivées dans notre pays, nous lui ferons faire un très beau mariage avec la plus jolie Grecque de Kaïssaria !» Alors Abriza dit : «O Grain-de-Corail, ne lui dis rien toi-même, mais conduis-le-moi ici et je lui parlerai moi-même.» (à suivre...)