Résumé de la 31e partie n La reine Abriza eut une triste fin. Elle fut tuée par un esclave noir qui s?enfuit avec tous ses biens. L?enfant, dont elle vient d?accoucher, est récupéré par Grain-de-Corail. Mais à peine Grain-de-Corail avait-elle cessé de se lamenter qu'elle vit un nuage de poussière remplir le ciel et s'approcher rapidement ; et soudain il se dissipa et d'en dessous, apparurent des soldats et des cavaliers, et tous vêtus à la mode militaire de Kaïssaria. Or c'était en effet l'armée du roi Hardobios de Kaïssaria, le père d'Abriza. Car des rumeurs étaient parvenues jusqu'au roi Hardobios, lui apprenant qu'Abriza s'était enfuie du monastère : il avait aussitôt rassemblé ses troupes, en avait pris lui-même le commandement et s'était mis en marche sur Bagdad ; et c'est ainsi qu'il arriva au lieu où venait de succomber sa fille Abriza. A la vue du corps ensanglanté de sa fille, le roi se jeta à bas de son cheval et tomba évanoui en embrassant le corps étendu ; et Grain-de-Corail se remit à pleurer plus chaudement et à se lamenter. Puis quand le roi fut revenu à lui, elle lui raconta toute l'histoire et lui dit : «Celui qui a tué ta fille est un nègre d'entre les nègres du roi Omar Al-Némân, ce roi plein de lubricité qui a fait ce qu'il a fait avec ta fille !» Et le roi Hardobios, à ces paroles, vit le monde entier en noir, et résolut une vengeance terrible. Mais il se hâta de faire apporter une litière sur laquelle il plaça le corps de sa fille, et il fut obligé de retourner d'abord à Kaïssaria pour les devoirs de l'inhumation et les funérailles. Lorsque le roi Hardobios fut arrivé à Kaïssaria, il entra dans son palais et fit venir sa nourrice, Mère-des-Calamités, et lui dit : «Nourrice, vois ce que les musulmans ont fait de ma fille ! Le roi a ravi sa virginité, et l'esclave l'a voulu violer et l'a tuée ! Et d'elle est né cet enfant que soigne Grain-de-Corail. Or, je jure par le Messie de venger ma fille et de laver l'opprobre dont on m'a couvert. Sinon je préférerais me tuer de ma propre main !» Et il se mit à pleurer à chaudes larmes. Alors, Mère-des-Calamités lui dit : «Pour ce qui est de la vengeance, ne t?en préoccupe pas, ô roi ! c'est moi seule qui ferai expier ses crimes à ce musulman. Car je le tuerai, lui et ses enfants, et d'une manière à faire longtemps l'objet des histoires que l'on racontera dans les temps futurs, dans toutes contrées de la terre. Mais il faut que tu écoutes bien ce que j'ai à te dire et que tu l'exécutes fidèlement. Voici. Il faut faire venir dans ton palais les cinq jeunes filles les plus belles de Kaïssaria, celles aux seins les plus beaux et à la virginité intacte. Et il faut faire venir, en même temps, les plus grands savants et les plus fins lettrés des contrées musulmanes qui avoisinent ton royaume. Et tu donneras l'ordre à ces savants musulmans d'élever les adolescentes d'après leur méthode. Et ils leur enseigneront ainsi la loi musulmane, l'histoire des Arabes, les annales des khalifes et tous les actes des rois musulmans ; de plus, ils leur enseigneront l'art de se conduire, la politesse, la façon de parIer aux rois, la façon de leur tenir compagnie en leur servant à boire, les plus beaux vers et la plus gentille manière de les réciter, la manière de composer les poèmes et les discours, ainsi que l'art des chansons. Et il faut que cette éducation soit complète, même au risque de durer dix années ; car il nous faut prendre patience et savoir que les Arabes du désert disent : ?La vengeance est encore réalisable même au bout de quarante ans.? Car la vengeance que je prémédite n'est réalisable que par cette éducation accomplie des adolescentes ; et, pour t'édifier, je te dirai que ce roi musulman a un grand faible pour la copulation avec ses esclaves et qu?il en a déjà trois cent soixante, outre les cent compagnes laissées par notre défunte reine Abriza et outre les cadeaux en femmes qui lui viennent en tribut de tous les côtés. C?est donc par son penchant que je le ferai périr !» (à suivre...)