Même les grands malades, notamment les cancéreux, ont le droit de ne pas souffrir. Pour peu que les traitements, ? morphine, entre autres ? soient accessibles à tous. Ce n?est malheureusement pas le cas chez nous. «Des cancéreux finissent par mourir de douleur et d'autres se suicident par lassitude.» L?amer aveu d?un praticien a jeté l?émoi au sein de ses collèges nationaux et étrangers réunis, hier, à l?Hôtel Sheraton à l?occasion du 2e Congrès national de la douleur, organisé durant deux jours par la Société algérienne d'évaluation et de traitement de la douleur (Saetd). Les cancérologues voulaient d?abord lancer un message. «Le patient ne se résume pas à une addition d'organes formant un corps, mais une personne avec des douleurs qu'il est nécessaire de prendre en charge par respect pour sa dignité», a déclaré le Pr Brahim Griène, président de la Saetd. Première fausse note, la prescription par le médecin de la morphine aux patients gravement atteints. Celle-ci, telle qu?elle est réglementée actuellement, n?a pas manqué de susciter l?indignation des conférenciers. Actuellement, le médecin en charge du traitement de la douleur ne peut prescrire de morphine pour son patient que sur ordonnance «sécurisée» et pour une durée très limitée (7 jours) renouvelable. Les intervenants, par souci de déontologie et d?éthique, appellent, du coup, à «l'allégement de la réglementation de la prescription de la morphine, jugeant la législation en vigueur obsolète». L?autre anomalie relevée par les participants au congrès, est la distribution de la morphine importée ? de France essentiellement ? en quantités insuffisantes et qui reste encore confinée à seulement deux officines sur la place d'Alger, alors que ce médicament-remède «ne présente aucun danger pour la santé du patient et ses effets secondaires sont minimes», a-t-on assuré. «Les malades de toutes les wilayas sont contraints de faire des déplacements incessants vers la capitale pour s'approvisionner en morphine, nécessaire à leur traitement», a-t-on encore déploré. L?évolution de la maladie et par ricochet la douleur qui en découle ont été par ailleurs, «passées au scanner» par le Dr Nadia Bouamrane de Birtraria. Pour cette spécialiste «le premier problème posé par la douleur est d'abord celui de son évaluation de la manière la plus objective possible, une mesure nécessaire et préalable à sa prise en charge thérapeutique». Or, «il n'existe aucun marqueur précis pour quantifier l'intensité de la douleur et voir les capacités de compréhension des malades», a-t-elle regretté. Le Pr Bouamrane précise que «la nécessité d'une évaluation de la douleur apparaît encore plus nettement chez les sujets âgés, car les plus exposés aux douleurs chroniques».