Résumé de la 48e partie n Le destin sert admirablement le marchand qui a acquis pour cent mille dinars la belle Nôzhatou qui va l?aider à s?introduire auprès du roi Omar Al-Némân. Et Nôzhatou dit : «En effet, ô vénérable cheikh ! Je connais le Coran et les préceptes de sagesse ; et, en outre, les sciences médicales ; le livre de l'Introduction aux arcanes ; les commentaires des ?uvres d'Hippocrate et de Galien le Sage que j'ai moi-même annotés ; j'ai lu les livres de philosophie et de logique ; je connais les vertus des simples et les explications d'Ibn-Baytar ; j'ai discuté, avec les savants, le Khânoun d'Ibn Sîna ; j'ai trouvé l'explication énigmatique des allégories et je les ai dénouées ; j'ai tracé toutes les figures de géométrie ; j'ai parlé avec connaissance de l'architecture ; j'ai longuement étudié l'hygiène et les livres Chafîat, la syntaxe, la grammaire et les traditions de la langue ; et j'ai fréquenté la société des savants et des érudits dans toutes les branches ; et je suis moi-même l'auteur de plusieurs livres sur l'éloquence, la rhétorique, l'arithmétique, le syllogisme pur ; et je connais les sciences spirituelles et divines ; et j'ai retenu tout ce que j'ai appris ! Et maintenant donne-moi le calam et la feuille de papier pour que j'écrive la lettre, si tu veux ! Et je t'écrirai toute la lettre en vers bien rythmés, pour que, durant toute la route de Damas à Bagdad, tu puisses éprouver du plaisir à la lire et la relire, et te dispenser d'emporter avec toi des livres de voyage ; car elle te sera une douceur dans la solitude et un ami discret dans les loisirs !» Alors le pauvre marchand, complètement ahuri, s'exclama : «Ya Allah ! Ya Allah ! Heureuse la demeure qui te servira de gîte ! Et combien heureux celui qui habitera avec toi !» Et il lui apporta respectueusement l'écritoire et les accessoires. Et Nôzhatou prit le calam, le trempa dans le tampon imbibé d'encre, l'essaya d'abord sur son ongle, et écrivit ces vers : «Cette écriture est de la main de celle aux pensées égales en tumulte aux vagues plaintives ; «Celle dont l'insomnie a brûlé les paupières et les veilles usé la beauté, «Celle qui, dans sa douleur, ne différencie plus le jour d'avec la nuit et se tord, lamentable, sur la couche solitaire ; «Et qui n'a pour confidents que les astres silencieux dans la solitude fatale des nuits ! «Voici ma plainte en vers cadencés, à rime égale, que j'ai tissés en mémoire de tes yeux ô toi, de mes doigts naturels. Des délices de la vie je n'ai senti nulle corde vibrer en mon âme, «Et ma jeunesse n'a éprouvé nulle joie débordante ni sourire heureux dans un jour de félicité. «Car ton absence a appris à mes yeux les veilles et m'a pour toujours enlevé le sommeil. Et j'ai eu beau confier à la brise mes soupirs, jamais la brise ne les a transmis à celui vers qui ils s'exhalaient. «Aussi, désespérée, je n'ose plus insister. Mais je veux signer ma plainte et mon nom. «Moi la douloureuse, l'éloignée de ses parents et son pays, la torturée de c?ur et d'esprit, Nôzhatou?Zaman.» Lorsque Nôzhatou eut fini d'écrire, elle sabla la feuille, la plia soigneusement et la remit au marchand qui la prit respectueusement, la porta à ses lèvres puis à son front, la serra dans une étoffe de satin et s'écria : «Gloire à Celui qui t'a modelée, ô merveilleuse créature !» A ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et, discrète, se tut. (à suivre...)