Résumé de la 94e partie n La première manche de la bataille a été gagnée par Scharkân. Le roi Daoul'makân adopte une nouvelle stratégie pour la bataille finale. Or, avec le matin, tous les guerriers étaient debout sous les armes. Et sur les tentes flottaient les pavillons et brillaient les croix, de tous côtés. Et les guerriers des deux camps firent d'abord leurs prières. Les Croyants écoutèrent la lecture du premier chapitre du Coran, le Chapitre de la Vache ; et les mécréants invoquèrent le Messie fils de Mariam et se purifièrent avec les fèces du patriarche, mais des fèces certainement falsifiées à cause de la grande quantité de soldats fumigés. Cette fumigation ne les sauvera pas du glaive ! En effet, au signal donné, la lutte recommença plus terrible. Les têtes s'envolaient comme des balles ; les membres jonchèrent le sol et le sang coula à torrents et tellement que les chevaux en eurent jusqu'au poitrail. Mais soudain, comme par l'effet d'une panique considérable, les musulmans, qui jusque-là avaient combattu en héros, tournèrent le dos et s'enfuirent tous jusqu'au dernier. A ce spectacle de l'armée musulmane qui s'enfuyait de la sorte, le roi Aphridonios de Constantinia dépêcha un courrier au roi Hardobios, dont les troupes jusque-là n'avaient pas pris part à la bataille, en lui disant : «Voilà que fuient les musulmans ! Car nous avons été rendus invincibles par l'encens suprême des fèces patriarcales, dont nous nous étions fumigés et dont nous avions enduit nos barbes et nos moustaches. Maintenant, à vous autres d'achever la victoire en vous mettant à la poursuite de ces musulmans et en les exterminant jusqu'au dernier ! Et de la sorte nous vengerons la mort de Lucas, notre champion...» A ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et se tut discrètement. La nuit venue, elle dit : «Et de la sorte nous vengerons la mort de Lucas, notre champion !» Alors le roi Hardobios, qui n'attendait que l'occasion de venger enfin le meurtre de sa fille, l'admirable Abriza, cria à ceux de son armée : «O guerriers ! Sus à ces musulmans qui fuient comme des femmes !» Or, il ne savait point que c'était là une tactique du brave d'entre les braves, le prince Scharkân, et de son frère Daoul'makân. En effet, au moment où les chrétiens de Hardobios, les ayant poursuivis, étaient arrivés jusqu'à eux, les musulmans s'arrêtèrent dans leur fuite simulée et, à la voix de Daoul'makân, se précipitèrent sur leurs poursuivants, en criant : «Allahou Akbar !» Et Daoul'makân, pour les exciter à la lutte, leur jeta cette harangue : «O musulmans, voici le jour de la religion ! Voici le jour où vous gagnerez le paradis ! Car le paradis ne se gagne qu'à l'ombre des glaives !» Alors ils s'élancèrent comme des lions. Et ce jour-là ne fut point pour les chrétiens le jour de la vieillesse, car ils furent fauchés sans avoir eu le temps de voir blanchir leurs cheveux. Mais les exploits accomplis par Sharkân, dans cette bataille soudaine, sont au-dessus de toutes paroles. Et pendant qu'il mettait en pièces tout ce qui se présentait sur sa route, Daoul'makân fit hisser le drapeau vert, signal convenu avec ceux de la vallée. Et il voulut se précipiter lui aussi dans la mêlée. (à suivre...)