Résumé de la 134e partie n Le jeune Aziz commença à raconter ce qui a fait de lui l'homme le plus triste sur terre. Et la sueur continuait à couler de mon front sur ma figure, tant la chaleur était intense, et je n'avais rien sur moi pour l'essuyer mon mouchoir étant étendu sous moi, et j'en étais bien marri et ma torture activait encore ma transpiration. Enfin, pour sortir de cette fâcheuse perplexité, je me disposais à relever le pan de ma robe neuve pour essuyer les grosses gouttes qui me sillonnaient les joues, quand soudain je vis tomber devant moi, comme un souffle de la brise, un mouchoir blanc en étoffe de soie dont la seule vue me rafraîchit l'âme et dont le parfum eût guéri l'infirme. Je me hâtai de le ramasser et de regarder au-dessus de ma tête pour me rendre compte de ce que pouvait être l'affaire et alors mes yeux rencontrèrent les yeux d'une jeune personne, celle-là même, ô mon seigneur, qui, dans la suite de l'histoire, me donnera la première gazelle brodée sur l'étoffe carrée. Donc, je la vis elle-même… A ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et se tut discrètement. Lorsque fut la cent treizième nuit, elle dit : Et je la vis elle-même penchée et souriante à la fenêtre de bronze de l'étage supérieur. Je n'essaierai même pas de dépeindre sa beauté, ma langue en étant trop incapable en vérité. Et tout saisi, tout perplexe et soudainement enflammé de désir, j'eus beau regarder vers la fenêtre, espérant revoir cette apparition qui m'enlevait l'âme, la fenêtre resta obstinément fermée. Et je ne désespérai que lorsque, ayant attendu là, sur ce banc, jusqu'au coucher du soleil, oubliant et mon contrat de mariage et ma fiancée, je constatai que décidément mon attente est vaine. Alors je me levai, le cœur bien en peine, et je me dirigeai vers ma maison. En route, je me mis à déplier le mouchoir en question, dont le seul parfum me délecta si intensément que je me crus déjà au paradis. Lorsque je l'eus tout à fait déplié, je vis qu'il portait sur l'un de ses coins, ces vers inscrits d'une belle écriture entrelacée : «J'ai essayé de me plaindre pour lui faire sentir la passion de mon âme, au moyen de cette écriture fine et compliquée. Car toute écriture est l'empreinte même de l'âme qui l'imagine. Mais il me dit l'ami : ”Ton écriture, pourquoi si fine et torturée, et telle qu'elle se subtilise à ma vue ?” Je répondis : ”Moi même je suis si énervé et torturé ! Es-tu donc si naïf que tu n'y reconnaisses pas l'indice de l'amour ?”» Et sur l'autre coin du mouchoir, ces vers étaient écrits en grands caractères réguliers : «Les perles unies à l'ambre, et la pudeur incarnadine des pommes sous les feuilles jalouses à peine pourraient-elles te dire la clarté de ses joues sous le duvet. Et si tu cherchais la mort, tu la trouverais sous les lourds regards de ses yeux aux victimes sans nombre. Mais si c'est l'ivresse que tu désires, laisse les vins de l'échanson ! N'as-tu point les joues rougissantes de l'échanson ? Et si tu veux connaître sa fraîcheur, les myrtes te la diront, et sa flexibilité, les courbes des rameaux !» A suivre