Nous négligeons de commenter l'invraisemblable guidage par une étoile miraculeuse, pour nous pencher sur l'histoire des Rois mages. De qui s'agit-il, au juste ? Ni l'histoire de l'antiquité orientale, ni l'antiquité occidentale ne font mention de monarchie fondée par des mages. Le mot semble avoir été choisi pour son évocation obscure, tant il est vrai que pour beaucoup de gens, la foi consiste à n'adorer que ce qui est nébuleux ou incompréhensible. De plus, qu'entend-on par mage ? Le mot, selon son étymologie sanscrite — mahnat — signifie dignitaire. Il était employé à l'époque de Jésus pour désigner tout membre de la classe sacerdotale instituée par Zoroastre dont la doctrine religieuse basée sur le dualisme, était assortie de croyances et de pratiques hétéroclites : astrologie, divination, occultisme, superstitions, connaissance élémentaire de la médecine et de l'histoire naturelle. Les premiers écrivains ecclésiastiques parlaient de mages. D'autorité, saint Léon en fixa le nombre à trois et sa décision, quoiqu'arbitraire et en contradiction avec les textes évangéliques qui ne donnent aucun chiffre, prévalut comme tradition indiscutable. Selon une autre opinion, les corps de ces singuliers voyageurs seraient conservés à la cathédrale de Cologne ! Peu importe leur nombre ; l'essentiel est que cela semble en rapport avec la conception trinitaire de la religion. Ce qui est plus bizarre encore, c'est que ces mages furent investis seulement au Ve siècle ap. J.-C. de la dignité royale, avec l'institution de l'Epiphanie ou fête qui était celle de la famille, du roi ou de la reine de la fève. Elle était célébrée, à l'origine, en même temps que celle de la Nativité (6 janvier). Mais pour diverses raisons, elle en fut séparée et Noël fut fixé au 25 décembre. Le seul ennui c'est que Noël doit être rattaché, quant à son origine, aux fêtes païennes célébrées en l'honneur de Saturne et donc antérieure à la Nativité et aux mages. Elle fut, en fait, instituée par le pape Jules 1er (m. en 352) aux lieu et place d'une fête païenne, la fête des fous ! On peut encore se poser cette question : d'où seraient venus ces royaux prêtres guidés par une étoile dont l'approche aurait pourtant réduit en fumée, sous l'action de la chaleur, notre insignifiante planète ? Selon Tertulien (apologiste chrétien, mort en 245 ap. J.-C.), ils seraient venus du Yémen, chargés d'or, de vases précieux et de résine odorante (myrrhe). Selon saint Augustin (mort en 430 ap. J.-C.), ils seraient venus plutôt d'Arménie. Malgré leur inconsistance et leur invraisemblance, ces légendes sont encore crues et fêtées par les chrétiens. En tout cas, les peintres leur ont consacré des centaines de tableaux d'une valeur artistique inestimable mais d'une authenticité historique nulle. C'est le seul côté positif de ces mirages dogmatiques. Sur la naissance de Jésus pèse une autre équivoque à propos de laquelle les chrétiens glissent d'habitude sans crier gare, et qui est pourtant l'une des plus grandes divergences entre l'islam et le christianisme : Jésus est-il né avant ou après le mariage de Joseph avec Marie ? Selon l'islam, la naissance de Jésus eut lieu durant leurs fiançailles et c'est au temple dont elle était devenue servante que l'archange Gabriel lui annonça la surnaturelle nativité du futur prophète. (à suivre...)