Résumé de la 20e partie n En l'absence de l'émir des Croyants, Schamsennahar et le prince Ali se retrouvent chez Amin. Mais bientôt le joaillier Amin pensa qu'il était temps de servir ses hôtes et il s'empressa, aidé de la jeune fille, de leur apporter d'abord les parfums agréables qui les disposèrent à toucher aux mets, aux fruits et aux boissons qui étaient en abondance et de première qualité tout à fait. Après quoi, Amin leur versa l'eau de l'aiguière sur les mains et leur tendit les serviettes aux franges de soie. Et c'est alors que, complètement ranimés et remis de leur émoi, ils purent commencer à vraiment goûter les délices de leur réunion. Aussi Schamsennahar, sans davantage différer, dit à la jeune fille : «Donne-moi ce luth, que j'essaie de lui faire dire la passion considérable qui crie en mon âme !» Et la confidente lui présenta le luth, qu'elle prit et posa sur ses genoux, et, après en avoir rapidement harmonisé les cordes, elle préluda d'abord par un chant sans paroles. Et l'instrument, sous ses doigts, sanglotait ou riait et son âme s'exhalait toute en fusées mélodiques qui les tinrent tous haletants. Alors commença leur extase. Et alors seulement, les yeux perdus dans les yeux de son ami, elle chanta : «O mon corps d'amoureuse, tu t'es fait diaphane à attendre en vain le bien-aimé ! Mais le voici ! Et la brûlure de mes joues, sous les larmes versées, s'adoucit de la brise de sa venue ! «O nuit bénie aux côtés de mon ami, tu donnes à mon cœur plus de douceur que toutes les nuits de mon destin ! «O nuit que j'attendais, que j'espérais ! Mon bien-aimé m'enlace de son bras droit, et de mon bras gauche je l'enveloppe, joyeuse !» Lorsqu'ils entendirent ce chant, ils furent tous les trois dans une jouissance si considérable qu'ils s'écrièrent du fond de leurs poitrines : «Ya leil ! ya salam ! Voilà ! ah ! voilà des paroles de délice !» Puis le joaillier Amin, jugeant que sa présence n'était plus nécessaire et au comble du plaisir en voyant les deux amants dans les bras l'un de l'autre, se retira discrètement et, pour ne point s'exposer à les troubler, se décida à les laisser seuls dans cette maison. Il prit le chemin du logis où d'ordinaire il habitait et, l'esprit tranquille désormais, il ne tarda pas à s'étendre sur son lit, en pensant au bonheur de ses amis. Et il s'endormit jusqu'au matin. Or, en se réveillant, il vit devant lui, la figure convulsée d'épouvante, sa vieille négresse qui se frappait les joues de ses mains, en se lamentant. Et, comme il ouvrait la bouche pour s'informer de ce qui avait bien pu lui arriver, l'effarée négresse lui montra d'un geste silencieux un voisin qui était à la porte attendant son réveil. A la prière d'Amin, le voisin s'approcha et, après les salams, lui dit : «O mon voisin, je viens te consoler dans l'épouvantable malheur qui s'est abattu cette nuit sur ta maison !» Et le joaillier s'écria : «De quel malheur parles-tu, par Allah ?» L'homme dit : «Puisque tu ne le sais pas encore, sache que cette nuit, à peine étais-tu rentré chez toi, des voleurs, qui n'en sont pas à leur premier exploit et qui t'avaient probablement vu, la veille, au moment où tu transportais dans ta seconde maison des choses précieuses, ont attendu ta sortie pour se précipiter à l'intérieur de cette maison où ils ne croyaient rencontrer personne. Mais ils virent des hôtes que tu y avais logés cette nuit, et ils ont dû probablement les tuer et les faire disparaître, car on n'a pu en retrouver les traces. Quant à ta maison, les voleurs l'ont pillée entièrement, sans y laisser une natte ou un coussin. Et elle est maintenant nettoyée et vide comme elle ne l'a jamais été !» (à suivre...)