Mémoire n Une journée commémorative a eu lieu, hier, à la Bibliothèque nationale et ce, à l'occasion du centenaire de la naissance d'El-Mouhoub dit Jean Amrouche, poète et journaliste. «Cette journée commémorative, qui est également une journée de témoignage, intervient dans le cadre des missions que la Bibliothèque s'est assignées», a déclaré Amine Zaoui, directeur de la Bibliothèque nationale, ajoutant : «Notre souci, à travers ce genre de rencontre, est de rapatrier l'intelligence du pays (l'Algérie), longtemps restée dans l'exil et l'oubli.» L'orateur a, par ailleurs, a évoqué Jean Amrouche comme étant un poète immortel. «Jean Amrouche est un poète et les poètes ne meurent pas. Ils sont comme ces oiseaux migrateurs qui partent le temps d'une saison pour revenir la saison prochaine. Ils (les poètes) disparaissent durant une saison pour revenir pour une année, une génération.» Ainsi, Jean Amrouche reste immortel, un éternel poète dans notre mémoire et cela grâce à son legs poétique et intellectuel. Ont pris part à ce séminaire plusieurs universitaires ; et si Afifa Brerhi et Amina Bekkat ont évoqué le caractère littéraire de Jean Amrouche, Tassaâdit Yacine a, pour sa part, centré sa communication autour de l'engagement du poète pour l'indépendance de l'Algérie. Elle a évoqué son militantisme ainsi que son nationalisme prononcé. «Tous connaissent Jean Amrouche en tant que poète et homme de lettres, a-t-elle dit, mais rares sont ceux qui le connaissent comme un personnage qui a milité pour le droit de l'Algérie à l'indépendance». Et de poursuivre : «Jean Amrouche a cru en une Algérie où Français et Algériens pouvaient coexister.» L'oratrice a relevé que Jean Amrouche a longtemps cru en une interpénétration des deux cultures, des deux histoires, des deux peuples. «Il militait pour une Algérie humaine, ouverte, plurielle, avec toutes ses langues… » Il disait d'ailleurs : «Je suis un hybride culturel.» Mais vite ses croyances ont tourné court. Le rêve d'une Algérie plurielle s'est évanoui. L'intervenante a indiqué que l'année 1945 (le 8 mai) était pour Jean Amrouche une prise de conscience. «Il a compris que le rapprochement des deux communautés ne pouvait se faire, et pour cause parce que la France refusait, en abolissant le code de l'indigénat, d'accorder aux Algériens les mêmes droits que les Français.» Ainsi, Jean Amrouche s'est engagé dans la voie du nationalisme en consacrant le plus grand de son temps à l'écriture journalistique. «Il écrivait des articles où il attirait l'attention de l'opinion française [et même internationale] sur la situation de l'Algérie ainsi que sur les conditions de vie (misérables) du peuple algérien auquel il affichait son appartenance», a-t-elle dit. Ses plaidoiries en faveur d'une Algérie aux Algériens lui ont valu l'exclusion. «Il a été exclu parce qu'il était considéré comme un partisan du FLN dont il faisait l' apologie», a-t-elle souligné. Pour sa part, Pierre Amrouche, le fils, s'est félicité de l'initiative de la Bibliothèque espérant que c'est «le début de plusieurs rencontres en vue de construire ensemble notre mémoire collective», et s'est engagé à faire tout son possible pour remettre à la Bibliothèque nationale tous les documents de Jean Amrouche : «Je vous promets que j'essaierai de convaincre la famille Amrouche pour remettre à la Bibliothèque les documents et les archives de mon père pour que celle-ci les mette à la disposition des étudiants et chercheurs.»