Résumé de la 10e partie n Journée de travail chargée pour Neeve, malgré la tempête de neige. A midi, elle mange un sandwich commandé au traiteur et elle téléphone à son père. Ethel Lambston avait ajouté : «J'aborde les choses d'un œil neuf, le regard inquisiteur. Je suis n'importe quelle femme qui voit quelque chose pour la première fois ou sous un angle nouveau. J'écris sur le sexe, les relations entre les gens, les animaux, les cliniques, les organisations, l'immobilier, sur le bénévolat et les partis politiques et...» Elle avait conclu, hors d'haleine, ses yeux bleu sombre étincelants, ses cheveux d'un blond platiné voletant autour de son visage : «L'ennui c'est que je suis tellement prise par mon travail que je n'ai pas une minute pour moi. Si j'achète une robe noire, je finis par la porter avec des chaussures marron. Dites donc, vous avez tout ici. Quelle bonne idée ! ?a me réconforte.» Depuis dix ans, Ethel était devenue une cliente importante. Elle tenait à ce que Neeve l'aide à choisir le moindre bout de tissu, ainsi que les accessoires, et qu'elle établisse des listes lui indiquant ce qui allait avec quoi. Neeve passait de temps en temps chez elle pour l'aider à décider quels vêtements elle devait garder d'une année sur l'autre et ceux qui étaient à donner. Il y a trois semaines, Neeve était allée vérifier la garde-robe d'Ethel. Le lendemain, Ethel était venue à la boutique et avait commandé de nouvelles tenues. «J'ai presque fini cet article sur la mode pour lequel je vous ai interviewée, avait-elle dit à Neeve. Des tas de gens vont vouloir ma mort quand il sortira, mais vous l'adorerez. C'est de la publicité gratuite pour vous.» Lorsque Ethel avait fait sa sélection, Neeve s'était montrée en désaccord avec elle sur une seule tenue. Elle avait commencé par la retirer. «Je ne veux pas vous vendre ça. C'est un tailleur de Gordon Steuber. Je refuse de toucher à un seul de ses vêtements. Ce tailleur aurait dû repartir. J'ai cet homme en horreur.» Ethel avait éclaté de rire. «Attendez de lire ce que j'ai écrit sur lui. Je l'ai éreinté. Mais je veux ce tailleur. Il me va bien.» Aujourd'hui, tout en disposant les vêtements dans de solides housses de protection, Neeve sentit ses lèvres se crisper à la vue du tailleur de Steuber. Six semaines auparavant, la femme de ménage de la boutique lui avait demandé de conseiller une amie qui avait des problèmes. L'amie en question, une Mexicaine, avait raconté à Neeve qu'elle travaillait dans un atelier au noir, dans le sud du Bronx, dont le propriétaire était Gordon Steuber. «Nous n'avons pas de cartes de travail. Il menace de nous livrer à la police. La semaine dernière, j'ai été malade. Il nous a renvoyées, moi et ma fille, et n'a pas voulu payer ce qu'il nous doit.» La jeune femme semblait à peine âgée de trente ans. «Votre fille ! s'était exclamée Neeve. Quel âge a-t-elle ? — Quatorze ans.» Neeve avait annulé la commande qu'elle venait de passer à Gordon Steuber, en lui adressant une copie du poème d'Elizabeth Browning qui avait contribué à changer les lois sur le travail des enfants en Angleterre. Elle avait souligné la strophe : «Mais les jeunes, jeunes enfants, oh, mes frères, ils pleurent de douleur.» (à suivre...)