Constat n Le Maghreb est devenu une terre d'immigration. Avec ses 300 000 migrants subsahariens, l'Algérie n'est plus, seulement, un pays de transit. C'est ce qui ressort de la conférence débat animée, jeudi au Centre culturel français (CCF), par le géographe et maître de conférence à l'université d'Aix-en-Provence, Ali Bensaâd. «L'Algérie refuse d'admettre qu'elle est devenue un pays d'immigration et ce, malgré le fait que les immigrants subsahariens participent pleinement au PIB», avance le conférencier. L'orateur donne l'exemple du BTP et de l'agriculture. Il assure que l'immigration au Maghreb est un problème sociétal trop politisé. Selon lui, la nationalité maghrébine est la plus difficile à obtenir. Il poursuit en soulignant que l'immigration subsaharienne vers le Maghreb est en train de revivifier une activité commerciale et culturelle qui existait jadis. Concernant les nombreux morts qu'engendrent les milliers de tentatives d'immigration, l'intervenant communique des chiffres pour le moins dramatiques. «10 000 morts», c'est trois fois le nombre de morts du World Trade Center aux Etats-Unis selon M. Bensaâd. Mais, selon lui, tout cela a permis la mise en avant de la dimension humaine de l'immigration. Il explique que «le débat politique a évolué vers une prise de conscience généralisée sur la scène internationale». «Cette année, l'activité diplomatique la plus importante tourne autour de la question migratoire subsaharienne». «Elle dépasse celles de la guerre au Liban et du nucléaire iranien réunis», ajoutera-t-il. M. Bensaâd dit remarquer un phénomène inquiétant qui est l'ouverture de l'espace économique et la fermeture de l'espace humain entre le Maghreb et l'Union européenne. Car, dira-t-il, les pays maghrébins revoient leur législation pour rendre l'immigration plus répressive. «Ces pays-là sont en train de devenir une sorte de sentinelle avancée de l'Europe», affirme-t-il. Quant aux solutions apportées, en l'occurrence au processus de Barcelone et à la conférence de Rabat, «elles ont été critiquées contrairement aux réunions des 5+5». Il explique que le processus de Barcelone glisse de son axe thématique. Contrairement aux idées reçues, l'intervenant affirme que les immigrants subsahariens en Europe ne représentent qu'une infime minorité. Trois fois inférieure à celles des autres immigrations. «Actuellement, en France, les Chinois représentent 50% de l'immigration et le reste provient majoritairement des pays de l'est de l'Europe». L'exemple de la politique d'immigration de l'Espagne est cité en référence. «L'Espagne ne souffre pas de ses immigrants, 80% de sa croissance est due à l'accès des émigrés au marché du travail». En France, l'accès des émigrés maghrébins et subsahariens au travail est 20 fois inférieur à la moyenne.