Invité par le Centre culturel français d'Alger, Ali Bensaâd, professeur de géographie à l'université de Provence de Marseille, a donné, jeudi passé, une conférence dont le thème est d'une affreuse actualité, celle des migrants africains subsahariens qui sont triplement victimes du mirage européen, des flots qui connaissent “de lugubres histoires” et de la répartition injuste des richesses de leurs pays respectifs. “Ces eaux méditerranéennes ont englouti, durant un mois, deux fois plus que ne l'a fait l'Intifadha palestinienne et les attentats du 11 septembre”, a affirmé Bensaâd qui s'interroge sur la focalisation sur la migration africaine, alors que celle d'origine est-européenne est autrement plus importante. Pour l'ancien professeur de l'université de Constantine, lui-même parti en France alors que l'Algérie était prise dans la tourmente terroriste islamiste, le processus de Barcelone a tout à fait occulté l'aspect humain de ce drame et les conférences internationales dont a-t-il dit avoir critiqué l'orientation politique parce qu'elles ont privilégié l'aspect sécuritaire. Cependant, Ali Bensaâd voit dans ces flux migratoires un désordre salvateur. “Ces migrants africains ont ramené quelque chose de salutaire”. Au-delà des tragédies humaines, le conférencier a retenu de l'objet de ses études, la migration des Africains, “l'africanisation des villes comme Alger, Tamanrasset, Tripoli…” Mais peut-il être question d'africanisation de villes qui se trouvent en Afrique, et peut-on insister sur le terme “africain” lorsque que nous somme nous-mêmes, et le conférencier en premier, natifs de ce continent noir ? À cette question, Ali Bensaâd a répondu par un “mea-culpa. Beaucoup m'ont fait ce reproche”. Car c'est justement ici que réside le racisme ordinaire. C'est oublier ses propres origines et voir dans l'autre, qui partage pourtant des malheurs similaires, un étranger. Faut-il alors s'attendre à l'humanisation du processus de Barcelone, une ville bien européenne… SAMIR BENMALEK