En misant ses dernières ressources dans la guerre en Irak, George W. Bush s'est engagé seul, contre l'avis de l'opinion publique, de la majorité parlementaire et même de certains républicains et de membres de l'état-major militaire. A deux ans de la fin de son dernier mandat, M. Bush a choisi d'envoyer 21 500 soldats supplémentaires dans une opération à haut risque pour tenter de juguler la violence qui ravage le pays et menace d'emporter avec elle l'ensemble de sa présidence. «Il regarde sa propre postérité, et il ne veut pas être vu comme le Lyndon Johnson de la guerre d'Irak», estime Ned Barnett, consultant politique qui a collaboré avec des démocrates et des républicains lors de campagnes présidentielles. Président de 1963 à 1969, Lyndon Johnson a laissé l'image d'un homme brisé par la guerre du Vietnam, hanté par l'ampleur des pertes humaines, errant seul la nuit dans les couloirs de la Maison-Blanche, incapable de dormir. Pour Jamie McKown, professeur de sciences politiques au College of the Atlantic (Maine, nord-est), il serait trop cynique de croire que les présidents ne pensent qu'à leur postérité. Mais le plan annoncé hier ressemble surtout à une «tentative désespérée» d'essayer de sortir d'Irak avec quelque chose qui puisse, ne serait-ce que de loin, avoir l'air d'une victoire. «Il est dans une position politique très délicate, face à une opinion publique très méfiante», explique Tom Baldino, professeur à l'Université de Wilkes (Pennsylvanie, est), ajoutant que le président devait désormais convaincre les membres de son parti de rester encore un peu à ses côtés. Seule une poignée d'alliés au Congrès, derrière le sénateur John McCain, l'un des favoris à l'investiture républicaine pour la présidentielle de 2008, dans les cercles de réflexion comme l'American Enterprise Institute, et à l'état-major de l'armée semblent soutenir sa stratégie pour l'Irak.