Pour le président américain, George W. Bush, c'est véritablement la dégringolade, et son maigre espoir réside dans l'adoption en principe attendue de la nouvelle constitution irakienne, surtout après l'accord donné mercredi par différents groupes sunnites. Mais en quoi, se demande-t-on, cela aiderait Bush si par ailleurs rien ne doit changer comme le retrait de son armée devenue une préoccupation majeure des Américains depuis l'été dernier, soit depuis que ces mêmes Américains sont devenus intransigeants avec leur président, jusqu'à dire ouvertement leur désaccord. Dès juin dernier, Bush perdait des points dans les sondages et dans le sillage des sondages, tout le capital qu'il croyait avoir engrangé. Et les Américains, disait-on alors, refusant de gâcher leurs vacances, se sont donnés rendez-vous pour la rentrée. L'automne s'annonce difficile, avec une cote de popularité en chute libre, des scandales touchant ses alliés politiques, une situation toujours très instable en Irak et une économie en perte de vitesse. « Les chiffres de George W. Bush dans les sondages sont de pire en pire. Son taux d'approbation est au plus bas, et seulement 29% des gens s'estiment satisfaits des conditions actuelles », a souligné jeudi l'institut de sondages Pew Research Center. Selon le Pew, et une autre enquête d'opinion publiée par le Wall Street Journal et la chaîne de télévision NBC, moins de 40% des Américains s'estiment désormais satisfaits de leur président, soit le point le plus bas depuis son arrivée à la Maison- Blanche en janvier 2001. Réélu il y a moins d'un an pour un second mandat de 4 ans après une campagne difficile contre le démocrate John Kerry, George W. Bush, 59 ans, avait alors affirmé : « J'ai gagné du capital politique pendant la campagne, et j'ai maintenant l'intention de le dépenser. » Après avoir sillonné pendant 9 mois le pays pour défendre son projet de créer des plans d'épargne-retraite privés, M. Bush a abandonné la partie face au front uni de l'opposition démocrate, mais aussi de son propre parti républicain. En Irak, la stratégie de la Maison-Blanche reste suspendue au référendum sur la nouvelle constitution irakienne. Mais l'état-major américain reconnaît que la relève irakienne tarde à venir. Selon le sondage WSJ/NBC, une majorité d'Américains (51%) considère désormais que renverser Saddam Hussein, l'ancien président irakien, ne justifiait pas le coût humain et financier de la guerre. Ces chiffres sont corroborés par ceux du Pew Research Center, selon lesquels 50% des personnes interrogées condamnent la décision d'entrer en guerre, contre 44% en septembre. La superbe affichée par George W. Bush dans les semaines qui avaient suivi la prise de Baghdad - notamment son intervention en costume de pilote sur le pont d'un porte-avions - a fait place à des opérations de relations publiques au rabais. La vidéo-conférence organisée jeudi entre le président américain, à la Maison-Blanche, et un groupe de soldats américains et irakiens sur le terrain, a été violemment critiquée par les médias américains. Ils se sont indignés du fait que les réponses des soldats aient été soufflées par des conseillers du Pentagone. Un rejet de la constitution réduirait la stratégie américaine à néant, alors que, selon le sondage Pew, les Américains sont aussi nombreux (48%) à vouloir que leurs soldats quittent l'Irak au plus tôt que de les voir rester jusqu'à ce que ce pays soit stable (47%). Les enquêtes judiciaires visant des caciques du parti républicain, comme le chef du groupe parlementaire à la Chambre des représentants Tom DeLay ou l'Administration dans son ensemble rejaillissent également sur George W. Bush. Son principal conseiller politique, Karl Rove, a été entendu pour la 4e fois vendredi par le procureur spécial chargé de l'enquête sur la divulgation à la presse par des membres de l'entourage présidentiel du nom d'un agent des services secrets américains. Ce procureur doit boucler son enquête d'ici le 28 octobre. George W. Bush s'est engagé à ce que tout membre de son Administration identifié comme à l'origine de la fuite démissionne. Même l'économie, le point fort du président républicain pendant son premier mandat, bat maintenant de l'aile. Les prix élevés de l'essence et de l'énergie mécontentent les Américains. L'inflation montre aussi le bout de son nez avec la plus forte hausse mensuelle en septembre des prix à la consommation depuis mars 1980. Difficile de dire à un Américain de revoir son mode de vie et de rogner sur son confort. L'envolée des prix a commencé au début de l'été, tandis que des partisans de l'école publique montaient au créneau pour exiger plus de fonds. Quant aux soldats morts en Irak, ils sont de plus en plus nombreux.