Résumé de la 4e partie Les renforts sont arrivés. Ils ont les pieds dans les premiers rangs du potager lorsque Emile pousse un juron et tire en même temps. Une vraie fusillade. En effet, c?est réussi. Le coup de feu éclate, le plomb s?éparpille au centre du conseil de guerre, un homme est atteint à l?épaule. Dans la nuit, Emile retourne braconner sans problème, et le matin du cinquième jour, un nouveau fumet se dégage de sa cheminée. Il s?apprête à dévorer une caille, prise au collet. Quand il déjeune à midi, on entend ses chiens aboyer, ils réclament des os. Au-dehors, l?exaspération est à son comble. Personne ne peut soupçonner les parties de chasse nocturnes d?Emile. On suppose donc qu?il a préparé son siège depuis longtemps. Le sixième jour, Emile hurle qu?il a un message à transmettre : «J?ai écrit aux journaux ! J?explique tout ce qui se passe, j?exige que ma lettre parvienne au Petit Parisien !» La lettre est balancée à la fronde, roulée autour d?une pierre. «Messieurs les journalistes, je ne suis pas content de ce que vous écrivez. Je ne suis pas un assassin sanguinaire. Je ne voulais pas tuer Grandpied, mais seulement me venger. Il faut rectifier dans le journal. Et dire que l?on m?assiège ici, comme un forcené. On veut me tuer, mais je peux me défendre longtemps.» Le maire a un hoquet de surprise : ? Comment ? Mais il a lu le journal ! Comment a-t-il eu un journal, hein ? Comment ? Il a un complice ? Non. Emile n?a pas de complice. Il n?a que son astuce et sa ruse de coureur des bois. La nuit est sa complice. Il est allé jusqu?à l?entrée du bourg, il a fouillé dans la poubelle du boucher et trouvé Le Petit Parisien. Quoi qu?il en soit, le septième jour, le maire retourne voir le préfet, car Emile a conclu l?envoi de sa lettre par une fusillade triomphale. Elle prouve qu?il a des munitions inépuisables. Il fabrique ses balles lui-même et la situation ne peut plus durer. Un gendarme a été atteint en plein c?ur ! Certes il n?est pas mort, et la charge n?a même pas transpercé sa tunique, mais tout le département est en émoi. On accourt de partout, pour voir la maison assiégée. La rumeur se répand, les autorités sont ridicules, il faut que cesse ce désordre. Le neuvième jour, un gendarme tombe à nouveau. Cette fois, la blessure est sérieuse. Une chevrotine dans le ventre. Il faut l?opérer, il s?en sortira, il aura la médaille militaire, mais la coupe est pleine. Le dixième jour, c?est la troupe ! On parle de faire marcher le canon. Les hommes du 32e régiment d?infanterie prennent position, commandés par des officiers, sous la houlette d?un général ! Emile, qui écrit tout sur un petit carnet, note au soir de ce sixième jour : «Moi j?ai tiré quatre coups de fusil. J?ai eu un greffier, deux gendarmes et un sous-officier du 32e. A cette heure, ils ont du mal à s?asseoir.» Le matin du onzième jour arrivent les explosifs. Un officier détermine l?emplacement de la charge et choisit l?endroit où, selon les renseignements recueillis, Emile ne se trouve pas. Or il s?y trouve justement. Il dort dans le foin et il ne comptait pas sur une attaque aussi sournoise. L?explosion est effrayante, Emile est projeté en l?air et se retrouve coincé entre deux poutres par son ceinturon de chasse. Il a les bras libres mais n?arrive pas à se dégager. Une odeur de mélinite se répand dans la maison, l?étouffant à moitié. Une demi-heure passe, sans qu?il ait réussi à se dégager. Que font-ils dehors ? Pourquoi ne viennent-ils pas le chercher ? Les portes et les fenêtres ont dû voler en éclats ! La seconde explosion délivre Emile, qui dégringole brutalement au rez-de-chaussée, juste devant la cheminée, où une gibelotte était censée cuire à petit feu pour le dîner du soir. La fumée, la poussière, le gaz étouffent Emile, qui se traîne à une fenêtre béante et saute au-dehors sans que personne le voie. Il gagne la route, en se traînant, à moitié assommé et suffocant. Enfin il aperçoit une ombre : «Hé ! militaire ! je me rends ! Attendez? mais attendez !» Ce n?était pas un militaire, mais un paysan curieux et froussard, qui s?enfuit à toutes jambes, craignant qu?on ne lui tire dessus. Emile Roy se retrouve dans un champ de blé à peine levé, la tête lui tourne, il s?écroule entre deux sillons, à cent mètres de sa maison détruite. C?est là que les assiégeants le retrouvent, aplati, la face contre terre, sans arme et couvert des poussières de sa maison, qui brûle maintenant. (à suivre...)