Résumé de la 57e partie n Neeve, à travers des photos accrochées au mur, se plonge dans des souvenirs lointains. Une époque où la chaleur familiale et l'amour parental étaient de mise. Délibérément, elle mania brutalement les récipients tandis qu'elle mesurait, versait, coupait, faisait sauter, mijoter et cuire. Regardons la vérité en face. Myles était le plus grand macho de l'univers. Si Renata avait suivi des cours d'art, si elle était devenue une médiocre aquarelliste, il aurait considéré que c'était un passe-temps féminin. Il était simplement incapable de comprendre qu'aider des femmes à choisir des vêtements seyants pouvait influencer leur vie sociale et active. On parle de moi dans Vogue, Town and Country, The New York Times, et Dieu sait où encore, songea Neeve, mais il n'en démord pas. Pour lui, c'est du vol de faire payer des vêtements aussi cher. Elle se souvint de l'irritation de Myles lors de la réception qu'ils avaient donnée pour Noël, quand il avait trouvé Ethel Lambston dans la cuisine en train de feuilleter les livres de cuisine de Renata. «Vous intéressez-vous à la cuisine ?» lui avait-il demandé d'un ton glacial. Naturellement, Ethel n'avait pas remarqué sa contrariété. «Pas du tout, avait-elle répondu d'un ton dégagé. Je lis l'italien et j'ai vu ces livres. Questi disegni sono stupendi.» Elle tenait le livre qui contenait les croquis. Myles le lui avait pris des mains. «Ma femme était Italienne. Je ne parle pas la langue.» C'est à cet instant qu'Ethel avait réalisé que Myles était veuf et sans attaches et qu'elle ne l'avait plus quitté d'une semelle pendant toute la soirée. Tout fut enfin prêt. Neeve mit les plats dans le réfrigérateur, nettoya et dressa la table dans la salle à manger. Elle ignora délibérément Myles, qui regardait la télévision dans le bureau. Alors qu'elle finissait de disposer les plats de service sur la desserte, on donna les informations de vingt-trois heures. Myles lui tendit un petit verre de cognac. «Ta mère aussi avait l'habitude de cogner les récipients et les casseroles quand elle était en colère contre moi.» Il avait un sourire penaud de petit garçon. C'était sa manière de s'excuser. Neeve accepta le cognac. «Elle aurait dû te les jeter à la figure.» Ils rirent et, au même moment, le téléphone sonna. Myles souleva l'appareil. Son aimable «Allô» fit immédiatement place à un feu roulant de questions. Neeve vit sa bouche se durcir. Quand il reposa le récepteur, il dit d'une voix sans timbre : «C'était Herb Schwartz. On avait infiltré un de nos hommes dans le cercle des proches de Nicky Sepetti. On vient de le retrouver dans un tas d'ordures. Encore en vie, et il a une chance de s'en tirer.» Neeve écouta, la bouche soudain sèche. Le visage de Myles était contracté, mais elle n'aurait su dire ce qu'elle y voyait. «Il s'appelle Tony Vitale, dit Myles. Il a trente et un ans. Ils le connaissaient sous le nom de Carmen Machado. Ils lui ont tiré dessus à quatre reprises. Il aurait pu y rester, mais il a tenu bon. Il voulait nous faire savoir quelque chose. — Quoi ? fit Neeve dans un chuchotement. — Herb se trouvait dans la salle des urgences. Tony lui a dit : «Pas de contrat, Nicky, Neeve Kearny.» Myles porta sa main à son visage comme s'il voulait en cacher l'expression. Neeve contempla son visage angoissé. (à suivre...)