Débat n Le centre de presse d'El Moudjahid a organisé hier un débat autour de la politique éditoriale en Algérie et de ses incidences économiques sur la production et la diffusion du livre. Animée par des enseignants et chefs de département en bibliothéconomie de la faculté de Bouzaréah et des professionnels de l'édition, tels Abdelkrim Terrar et Achour Sellal, la conférence était basée sur la sensibilisation des pouvoirs publics sur les nombreux et inextricables problèmes auxquels sont confrontées les sociétés d'édition eu égard à la transformation de certaines librairies du centre-ville en fast-foods et pizzerias. La discussion éclairée autour de cette problématique cruciale étant pressante. M. Terrar a fait un rappel historique sur la chaîne de l'édition en dressant le bilan de la politique éditoriale de l'indépendance à nos jours. Il est parti, pour ce faire, d'un constat alarmant sur la non-disponibilité du livre en raison de sa cherté actuelle et s'est penché sur les raisons qui font que cet outil indispensable à la connaissance donc à la culture humaine, n'est plus à la portée de tous. Or, le livre qui joue un rôle important dans la vie sociale est «un lieu de révélation et de mémoire, il condense toute la réalité du monde, son avenir concerne notre devenir culturel», a déclaré M. Terrar. Et de s'interroger sur les raisons qui font, au gré des fluctuations politiques, que le livre, objet de savoir, reste toujours le parent pauvre de la culture. Il cite plusieurs facteurs qui entrent en ligne de compte : le taux d'analphabétisme qui avoisine les 30 % de la population, la forte dévaluation du dinar, l'absence d'une tradition littéraire et surtout d'un cadre juridique pour asseoir une législation qui protège et facilite la diffusion du livre, la dissolution des entreprises étatiques avec la fin des monopoles. «L'Algérien a aussi faim de l'esprit. L'Etat doit subventionner le livre, pour cela il faut une volonté politique. C'est ce déséquilibre politico-social qui fait que le livre revient cher», a-t-il martelé, soulignant qu'«il faudrait un ensemble de lois spécifique au livre pour que les maisons d'édition puissent tourner». L'achat de chaque titre par toutes les communes que compte l'Algérie peut permettre aux éditeurs de survivre face à cette crise puisque les maisons privées ont une production qui ne dépasse pas aujourd'hui les 3 000 exemplaires, alors que dans les années 1976 elle dépassait les 200 000 exemplaires avec 475 titres. Pour lui, «il y a une absence chronique d'une politique éditoriale». Le dysfonctionnement du réseau de la lecture publique et particulièrement la non-moralisation de la profession sont des facteurs aggravants. Dans son intervention, A. Sellal a évoqué le rôle prépondérant de l'Institut de bibliothéconomie dans la formation de professionnels du livre que sont les bibliothécaires. Par ailleurs, les programmes dispensés concernent la culture générale, l'initiation de l'étudiant à la recherche axée sur les problèmes du livre, l'université s'impliquant de plus en plus dans le champ éditorial.