Résumé de la 4e partie n Cette compilation de coupures de presse relatives à des affaires criminelles et sa riche bibliothèque rendent le policier perplexe sur Pietro Pizzani. La pauvre femme ignore complètement le sens des motifs sociaux et esthétiques invoqués par son mari, elle répète comme un perroquet qui a appris par cœur. — D'abord on a eu six couples, et puis une vingtaine, et puis quarante... On était obligés de manger du lapin tous les jours. On les nourrit avec des épluchures, je les ramasse dans les poubelles, et puis je vais aussi sur la colline de Fourvière ramasser de l'herbe. — Mais... vous vouliez en faire quoi, de ces lapins ? — D'abord mon mari voulait les vendre. Et puis ça a changé. — C'est-à-dire ? — Il restait enfermé avec eux des heures entières. On ne pouvait pas le déranger quand il était avec ses lapins. Même moi je ne pouvais pas. Mais je l'entendais murmurer, alors je savais qu'il leur parlait. — De quoi ? Effectivement, bonne question, de quoi peut-on parler à des lapins ? De l'actualité internationale ? De physique appliquée ? De droit criminel ? D'art et de littérature ? A en croire sa bibliothèque, Pietro Pizzani est un encyclopédiste... — Je ne sais pas de quoi il leur parlait. Mine de rien et sans sourire, l'inspecteur demande : — Est-ce que les lapins lui répondent ? — Sûrement, mais je crois qu'il n'y a que lui qui peut les entendre, et les comprendre, moi, je n'ai jamais réussi. Au centre de ce labyrinthe de lapins de toutes les couleurs, trône une cage plus grande que les autres, circulaire et posée sur des bornes de ciment. A l'intérieur un lapin énorme. Sautillant, alerte malgré sa taille impressionnante. Madame Pizzani le présente : — C'est Michel. — Et qu'a-t-il de particulier ce Michel ? Madame Pizzani ne sait pas de quels titres est honoré Michel, ni sa fonction exacte, ni les pouvoirs qu'il a sur son mari, mais ses pouvoirs sont certainement considérables, seul Pietro pourrait les définir. L'inspecteur reste un instant perplexe devant l'énorme lapin. Ce lapin supposé avoir imposé une maîtresse à Pietro Pizzani. Supposé lui avoir ensuite ordonné de la tuer... Histoire de fous, mais qu'il faut essayer d'élucider rapidement. Il est une heure passée, et l'inspecteur aimerait bien déjeuner après avoir fait son rapport. — Madame Pizzani, est-ce que votre mari est sorti il y a quatre jours ? — Non... non. C'était dimanche, il est resté à la maison toute la journée. — Est-ce que quelqu'un est venu chez vous ? — Oui... Carlotta... — Carlotta est-elle… la maîtresse de votre mari ? — Oui, bien sûr. Mais elle n'est pas restée, il l'a raccompagnée à la porte, je les ai entendus. Madame Pizzani lève ses grands yeux naïfs pour demander : — Mon mari va bien ? Réponse difficile, mais, après tout, vu l'état des lieux et l'esprit de la demanderesse... — Il va bien, madame Pizzani, on vous tiendra au courant. Le rapport de la Police judiciaire de Lyon mentionne que Pietro Pizzani est un original, mais ne semble pas entrer dans la catégorie des assassins. Aucun cadavre chez lui. Au commissariat de la gare de Lyon à Paris, le secrétaire raccroche son téléphone, il est deux heures de l'après-midi, et lui n'a pas eu le temps d'avaler un sandwich. Pris entre une troupe de prostituées, deux voleurs à la tire, et le petit maçon obstiné, il choisit de se débarrasser du maçon obstiné. (à suivre...)