Responsabilité n L'ancien Premier ministre français, Dominique de Villepin, a été inculpé, hier, pour «complicité de dénonciation calomnieuse» dans l'affaire Clearstream. Entendu durant 50 minutes par les juges qui instruisent ce dossier, devenu une affaire d'Etat, De Villepin a été mis en examen (inculpé) pour «complicité de dénonciation calomnieuse, recel de vol et d'abus de confiance, complicité d'usage de faux». L'affaire Clearstream, qui a éclaté en 2004, avait pour but de discréditer plusieurs personnalités censées avoir touché des pots-de-vin, via la société financière luxembourgeoise Clearstream, à l'occasion de la vente de frégates françaises à Taïwan. Le nom de M. Sarkozy est apparu en cours de route sur ces documents trafiqués. M. De Villepin a été placé hier sous contrôle judiciaire avec interdiction de rencontrer les principaux protagonistes de l'affaire ainsi que l'ex-président Jacques Chirac, dont il a longtemps été considéré comme le dauphin et dont le nom a été cité à plusieurs reprises dans le dossier. L'ancien Premier ministre a immédiatement fait appel de son contrôle judiciaire, qui prévoit en outre le versement d'une caution de 200 000 euros, selon des sources proches du dossier. «Je tiens à redire qu'à aucun moment je n'ai demandé d'enquête sur des personnalités politiques, qu'à aucun moment je n'ai participé à une quelconque manœuvre politique», s'est défendu devant la presse M. De Villepin après son inculpation. Il avait été convoqué par les juges Jean-Marie d'Huy et Henri Pons qui cherchent à démêler les fils de cette machination politique. M. Sarkozy estime avoir été victime d'une cabale destinée à torpiller sa carrière et n'a pas caché ses soupçons à l'égard de M. De Villepin, son grand rival à droite. Ecarté de la course à la présidence par son parti, l'UMP, M. De Villepin s'est éloigné de la scène politique depuis l'élection triomphale en mai de son rival. Il était rentré de vacances à Tahiti pour se rendre à la convocation des juges. Longtemps homme de l'ombre du président Chirac avant de devenir chef de la diplomatie, ministre de l'Intérieur puis Premier ministre en 2005, M. De Villepin a été mis en cause par plusieurs protagonistes de l'affaire. Il semble acquis qu'il ait commandité des enquêtes parallèles, hors de tout cadre judiciaire. Il aurait aussi poussé le «corbeau», son ami Jean-Louis Gergorin, ancien vice-président du groupe européen d'aéronautique et de défense Eads, à adresser anonymement les listings à la justice pour que les «coupables» soient démasqués. Mais il reste à ce stade deux interrogations majeures pour déterminer le degré de responsabilité de M. De Villepin : était-il au courant que les listings étaient trafiqués et, si oui, a-t-il encouragé d'une manière ou d'une autre l'introduction du nom de M. Sarkozy ? L'ex-Premier ministre a toujours nié le moindre comportement illégal, expliquant qu'il était de son devoir de démasquer d'éventuels comportements délictueux venant de hautes personnalités du monde politique ou économique.