Résumé de la 1re partie n Tellement angoissée par le retard de son mari, Rosine s'évanouit. Mais dès qu'elle reprend ses esprits elle annonce que son mari va arriver. Ce qui, d'ailleurs, se produit. Serait-elle devenue voyante ? Le docteur Marolle examine Rosine. Il lui pose de multiples questions, sur elle, sur son enfance, sur sa famille, sur ses croyances religieuses. Puis il dit : — Il semblerait que votre épouse, mon bon Chassignon, soit dotée de pouvoirs psychiques hors du commun. C'est un don du ciel, semble-t-il. — Des pouvoirs comment ? — Des pouvoirs psychiques. Son esprit parvient à accomplir des choses que, normalement, nous sommes incapables de réaliser. D'ailleurs, nous allons faire un petit essai. Ma chère Rosine, asseyez-vous le dos à la fenêtre. Et maintenant essayez de me décrire les gens qui passent dans la rue. Rosine s'exécute. Elle se concentre et fronce les sourcils : — Je vois une dame avec un chapeau vert et un parapluie. Elle donne le bras à un militaire. Et je vois deux bonnes sœurs. Il y a un marchand de tapis qui porte un tapis rouge sur l'épaule gauche... Voilà un grand chien noir et derrière lui un plus petit, tout blanc. Gilbert Chassignon, qui regarde par la fenêtre à côté du médecin, est bien forcé d'admettre que tout cela est parfaitement exact. A partir de ce jour, le docteur Marolle s'intéresse passionnément (et gratuitement) à Rosine. — C'est curieux. J'ai tenu le compte rendu exact de toutes les expériences de «bilocation» de Rosine c'est ainsi qu'on nomme le pouvoir de se trouver dans deux endroits en même temps. De toute évidence, avec le temps, elle parvient à se transporter par l'esprit de plus en plus loin. Rendez-vous compte, la semaine dernière, elle s'est retrouvée au Canada. — Oui, mais elle m'a dit qu'elle était très fatiguée en rentrant. Elle préfère nettement rester de ce côté de l'océan. Désormais, la vie des Chassignon est complètement bouleversée. Tous les jours, le facteur dépose chez eux un très nombreux courrier. Evelyne aide sa mère à le dépouiller mais il a fallu mobiliser deux ou trois personnes du quartier pour aider à répondre aux lettres. Et tout ça coûte cher. Il faut payer le papier, les enveloppes, l'encre et surtout les timbres... Heureusement que quelques dames aisées de la commune pourvoient à ces frais. Car Rosine ne veut rien demander en paiement de ses services : — On ne vend pas un don de Dieu. Aujourd'hui, Rosine a reçu une demande concernant un homme qui habite dans le Midi et qui ne donne plus de ses nouvelles depuis longtemps. On lui a remis un morceau de papier avec le nom et l'adresse de cette personne. Rosine se concentre. Puis elle entre en transe. A présent, elle n'a plus besoin de s'écrouler dans le fauteuil. On la voit qui commence à mimer son voyage. Comme si elle se rendait à pied à l'adresse indiquée. Ses bras se balancent dans le vide comme ceux de quelqu'un qui marche d'un bon pas. Les témoins qui se pressent dans la salle à manger des Chassignon commentent : — Regardez, elle s'arrête. On dirait qu'elle tire une sonnette. Elle dit bonjour à quelqu'un. Regardez ! Qu'est-ce qu'elle fait ? On dirait qu'elle ausculte quelqu'un. Comme le docteur Marolle. Et là, qu'est-ce qui lui arrive ? Elle marche un peu tordue. Avec la tête de travers. La personne qui a demandé à Rosine de faire ce voyage s'écrie : — Ah oui, c'est bien lui. C'est tout à fait la manière de se tenir de mon cousin Philipon. Regardez ! Qu'est-ce qu'elle fait ? Elle conduit une voiture. Ah ! (à suivre...)