L'évolution de la perception de la violence à l'égard des femmes a été au centre des débats jeudi, à Alger, à l'occasion de la célébration du 7e anniversaire du Réseau Wassila. Ces violences ont révélé, selon Mme Fadhila Chitour, présidente et fondatrice du Réseau Wassila, la situation dramatique que vivent certaines Algériennes. Aujourd'hui, il est vrai que le phénomène est moins tabou, affirme-t-elle, car il est plus visible. «L'écho de la violence est relevé un peu partout. Le travail engagé contre cette violence a contribué à une plus grande visibilité du phénomène», il s'agit, dit-elle, du plus grand changement. Les témoignages infiniment modestes de solidarité et l'indifférence de certaines institutions étatiques confortent les agresseurs dans leur droit de violence, ont, en outre, unanimement affirmé les participants à ce rendez vous. Même les informations véhiculées par les médias qui devraient contribuer à l'information de la société sont très mal traitées, avancent-ils. Et pour cause, il n'y a aucune vérification de la source pour tous les actes de violence. L'information est souvent dépourvue de commentaire, d'avis de sociologues, et encore moins de pédagogues, ce ne sont, donc, que de simples faits divers, déplorent-ils. En somme, les bilans présentés par les autorités sont exclusivement quantitatifs. Un manque d'intérêt qui donne lieu à des extrapolations hasardeuses, selon l'intervenante. Cette masse de violences dont on parle plus ou moins fréquemment, c'est la violence extrême, a tenu à rappeler, par ailleurs, la présidente du Réseau. En effet, devant le silence des victimes, il est très difficile de pouvoir les comptabiliser. Il existe, donc, des fardeaux moins visibles, mais non moins lourds. «Nombreuses sont les femmes qui vivent avec des partenaires violents et subissent dans le silence absolu les humiliations, les intimidations, les coups ...», témoigne Mme Chitour. Devant cet état de fait, l'intervenante s'interroge : «Y a-t-il réellement une avancée dans la prise de conscience individuelle et collective ?» Mais face à la banalisation de la violence sous toutes ses formes et la violence institutionnelle imposée par le code de la famille, Mme Chitour appréhende «le risque d'une anesthésie morale». Pour elle, la loi est dans l'incapacité de protéger la femme, et «ce ne sont pas les aménagements dérisoires et souvent non appliqués apportés au code de la famille qui vont changer quelque chose. Tout est à faire sur le plan juridique», a t-elle conclu.