Enjeu n Premier ministre, chef de la majorité parlementaire ou de nouveau Président de Russie : Vladimir Poutine entretient le suspense sur son avenir en donnant libre cours à des scénarios fantaisistes. Au pouvoir depuis 2000, le président russe a assuré à maintes reprises qu'il ne changerait pas la Constitution qui lui interdit de briguer un troisième mandat consécutif de quatre ans en mars 2008, mais qu'il resterait «influent». Mais, au mois d'octobre dernier, il crée la surprise en annonçant qu'il dirigera la liste du parti Russie unie aux législatives du mois de décembre prochain. Nombreux sont les analystes qui estiment qu'il restera aux commandes à la tête de Russie unie, qui proposera le gouvernement et le Président. Le parti aura aussi le pouvoir de destituer le chef de l'Etat s'il obtient une majorité des deux tiers au Parlement, un scénario crédible au vu des sondages. «Le centre du pouvoir se déplacera du Kremlin vers Russie unie, dirigée par Poutine, qui ne sera plus un parti de bureaucrates, mais une structure très puissante avec une sorte de Politburo dont les postes clés seront occupés par les gens de l'entourage de Poutine», estime la sociologue Olga Krychtanovskaïa, spécialiste des élites russes. Point faible de ce scénario, la Constitution garantit de très larges pouvoirs au président qui conduit la politique internationale, possède le code nucléaire et nomme les «siloviki», ces dirigeants de la défense, de l'Intérieur, des services secrets et de la justice. La loyauté du futur chef d'Etat n'est donc pas garantie. «Poutine a donné l'exemple. Il a écouté son prédécesseur Boris Eltsine pendant un an ou deux, puis il a mené sa politique», a rappelé le leader communiste russe Guennadi. Alexandre Chokhine, patron des patrons et proche du président, a récemment évoqué dans une interview à un hebdomadaire russe un mécanisme qui permettrait à Poutine de se représenter sans changer la Constitution en profitant d'une faille dans la loi électorale. Il s'agirait d'un départ avant terme, mais celui-ci doit intervenir une fois que la date de la présidentielle aura été fixée et avant qu'elle ne soit publiée au Journal officiel, soit un délai de cinq jours, a-t-il expliqué. La date définitive de l'élection a priori prévue pour le mois de mars prochain, pourrait être arrêtée dès, demain, lundi, par le Conseil de la Fédération. Hors de cette fenêtre de tir de cinq jours, son départ du Kremlin serait assimilé à une démission pure et simple et l'élection à une présidentielle anticipée. La loi lui interdit alors de se représenter. En cas de départ, l'intérim sera assuré par le Premier ministre jusqu'à la présidentielle. Vladimir Poutine pourra alors se représenter, conformément à la Constitution : ayant observé une pause de quelques semaines, il n'enchaînera pas un troisième mandat consécutif. «C'est contraire à l'esprit de la Constitution», commente toutefois Viktor Cheïnis, l'un des auteurs de la loi fondamentale. Selon lui, une solution «plus décente examinée par le Kremlin» serait l'élection d'un nouveau président en mars 2008 qui donnera sa démission au bout de quelques mois pour raisons de santé et conduira à la convocation d'une présidentielle anticipée à laquelle Poutine se représentera.