Phénomène n Mystère sur les hauteurs de Bab El-Oued. Précisément au bidonville baptisé Diar El-Kaf Sonatro, où des centaines de baraques ont poussé comme des champignons au pied de la légendaire carrière Jaubert. A quelques encablures de la place Triolet entièrement restaurée au lendemain de la catastrophe de 2001, 350 familles vivaient déjà le calvaire depuis des années. Jusqu'à cette fatidique nuit du 28 novembre, soit à la veille des élections locales, où le calvaire s'est transformé en cauchemar éveillé. «Vers minuit j'ai entendu un ruissellement d'eau. Il pleuvait depuis plusieurs jours et c'est tout naturellement que j'ai cru à un torrent provoqué par les eaux de pluie. Le torrent grondait de plus en plus fort et j'ai décidé de jeter un coup d'œil. J'étais étonné de constater qu'il ne pleuvait pas», raconte un habitant dont la masure, adossée à un rocher, domine tout le site. L'origine de l'eau est inexpliquée. L'alerte est donnée. Il faut dire qu'aucun de ces bidonvilles en parpaing ne pouvait résister à une infiltration d'eau. Tous les riverains sont tirés de leur sommeil et s'attellent sans tarder à parer au plus pressé : improviser un système de drainage pour empêcher l'eau d'emporter les masures de fortune. Au lever du jour, les malheureux, qui pensaient pouvoir enfin percer le mystère, n'en reviennent pas. L'eau suinte des parois des rochers à un très fort débit et se déverse en trombe sur les fragiles murs de parpaings. A mesure que le temps passe, l'eau se met à sourdre du sol même des habitations les plus proches du talus. Constatant que la situation est grave, les habitants font ce qui est indiqué en pareille circonstance : alerter les autorités locales. Sauf que ces dernières avaient d'autres chats à fouetter en ce jour béni d'élections. Ni l'APC ni la wilaya déléguée n'ont jugé utile, selon le témoignage des habitants, de dépêcher leurs services techniques «pour au moins déterminer l'origine du phénomène». Seule une équipe de pompiers s'est présentée et a rendu un terrible verdict : le danger est imminent et il faut évacuer les lieux sans plus tarder. «Sauf que nous n'avons pas où aller», déplore un quadragénaire qui nous apprend que des bienfaiteurs ont accepté d'héberger pour quelques jours sa femme et ses enfants. «J'ai peur, mais je n'ai guère le choix. Je passe la nuit…», dit-il, fataliste. En attendant que les services concernés daignent se pencher sur ce énième mystère, les supputations vont bon train et le phénomène constitue le seul sujet de discussion. «Je crois qu'il y a une conduite d'eau qui passe par-là. Elle a dû éclater», suppose un quinquagénaire. «C'est une curieuse coïncidence qu'elle éclate le jour même des inondations», rétorque son voisin qui croit même savoir que la conduite n'est plus fonctionnelle depuis des décennies. «Mais d'où vient alors toute cette quantité d'eau ?» «Cela doit être une source qui a jailli subitement. D'ailleurs, au début, l'eau était tiède comme celle des stations thermales», témoigne Mustapha, un quadragénaire. Un véritable mystère dont l'explication importe peu. Le plus urgent est d'évacuer les milliers d'âmes qui peuplent l'endroit, car vu la nature des habitations, le relief du terrain et la persistance du torrent et des infiltrations, une catastrophe imminente est à craindre. Il est utile de rappeler que la majorité des occupants de ce bidonville a été recensée comme sinistrés à la suite des inondations de 2001…