InfoSoir : Pensez-vous que le placement de nos réserves de change dans le Trésor américain est des plus judicieux financièrement ? Et ne serait-t-il pas plus opportun de diversifier les placements ? Hocine Amer Yahia : Le fait de placer nos réserves de change est mieux que de ne rien en faire, à défaut de faire fructifier cet argent à bon escient, dans la sphère réelle pour diversifier et développer notre économie autrement que par seulement les grands travaux engagés par l'Etat dans le cadre du programme de relance économique. Cependant, il s'agit en réalité d'une forme de thésaurisation, donc d'une politique qui privilégie l'attentisme au dynamisme, ce qui n'est pas la meilleure chose pour un pays qui espère depuis longtemps briser le cercle vicieux de la panne économique qui le frappe faute d'idées et faute d'une bonne gouvernance de la gestion des affaires de l'Etat. Cela étant, ces réserves ont leur contrepartie en dinars et si elles ne sont pas employées au développement économique du pays dans toutes ses dimensions, elles ne feront qu'éroder encore plus le pouvoir d'achat des Algériens et l'Algérie continuera à demeurer pour longtemps une consommatrice nette de ses ressources en hydrocarbures, jusqu'à leur épuisement. Les marchés financiers mondiaux connaissent depuis l'été dernier (août 2007) des turbulences, qualifiées par les économistes de crise de «subprime», pensez-vous que l'Algérie pourrait être touchée directement dans ses réserves de change déposées aux USA ? Dans la mesure où les placements ont la garantie des Etats emprunteurs, il n'y a aucun risque majeur. De plus la crise dite des «subprimes» reste quand même limitée dans son champ d'action. L'économie américaine reste très forte et l'économie mondiale connaît de nouveaux pôles de développement comme la chine, l'Inde, le Brésil etc. Nous ne sommes plus en 1929. Dans le même contexte, quel regard portez-vous sur la politique financière de la BA ? C'est une politique d'extrême prudence. Cela nous renvoie à la première réponse. Echaudées par la crise financière qui a frappé le pays dans les années 80/90 et celle plus récente qui a touché notamment certains pays de l'Asie, les autorités nationales continuent à privilégier les mécanismes administratifs aux mécanismes du marché. Cela ne fait que dévaloriser la monnaie nationale, freiner l'ouverture économique et alimenter le marché informel. Sur ce plan nous sommes en retard, y compris par rapport aux pays voisins.