Résumé de la 57e partie n Alvirah apprend avec stupeur que son mari vient d'être kidnappé. Par téléphone, on lui intime l'ordre d'attendre chez elle les instructions qui vont lui être dictées... L'appartement était situé au trente-troisième étage et jouissait d'une terrasse donnant sur Central Park. Alvirah éprouvait toujours le même bonheur dès qu'elle en poussait la porte. Il était extrêmement plaisant, et oui, elle avait un œil infaillible pour la décoration. Ces nombreuses années passées à faire le ménage chez les autres lui avaient plus appris, en matière d'architecture intérieure, que n'importe quelle école. Ils avaient acheté l'appartement meublé – fauteuils blancs, moquette blanche, abat-jour blancs, tables blanches, du blanc partout. Au bout de deux mois, Alvirah avait l'impression d'habiter dans un paquet de lessive. Elle avait tout donné au neveu de Willy et était partie faire les magasins. Mais aujourd'hui, la vue du canapé ivoire et de la chauffeuse assortie ne lui apporta aucun réconfort, pas plus que celle du profond fauteuil de Willy : avec son repose-pieds, du tapis d'Orient pourpre et bleu roi ou de la table et des chaises laquées noir du coin salle à manger ; elle n'apprécia même pas le dernier éclat du soleil couchant qui dansait sur le tapis de feuilles d'automne du parc. A quoi bon tout ça s'il arrivait quelque chose à Willy ? Du fond de son cœur, Alvirah souhaita n'avoir jamais gagné à la loterie, elle aurait tout donné pour se retrouver avec Willy dans leur trois-pièces de Flushing au-dessus de la boutique de tailleur d'Orazio Romano. C'était l'heure où elle rentrait à la maison après avoir fait le ménage chez Mme O'Keefe et où elle racontait à Willy que sa patronne était un vrai moulin à paroles. «Willy, elle ne la ferme jamais. Elle s'égosille même pour couvrir le bruit de l'aspirateur. Heureusement qu'elle n'est pas trop désordonnée. Je craquerais, sinon.» Le téléphone sonna. Alvirah s'élança vers le salon pour décrocher l'appareil puis changea d'avis et courut précipitamment dans la chambre à coucher. C'était là qu'était installé le répondeur. Elle pressa le bouton d'enregistrement en même temps qu'elle décrochait le récepteur. La même voix rauque chuchota : «Alvirah ? — Oui. Où est Willy ? Quelles que soient vos intentions, ne lui faites pas de maI.» Elle entendait un ronflement en arrière-plan comme un vrombissement d'avion au décollage. Willy se trouvait-il dans un aéroport ? «Nous ne lui ferons aucun mal si nous obtenons l'argent et tant que vous ne préviendrez pas les flics. Vous ne les avez pas appelés, j'espère ? — Non. Je veux parler à Willy. — Dans une minute. Combien avez-vous en banque ? — Un peu plus de deux millions de dollars. — Vous êtes franche, Alvirah. On s'en doutait. Si vous voulez revoir Willy, vous feriez mieux de commencer à faire quelques retraits. — Vous pouvez tout avoir.» Un petit gloussement se fit entendre à l'autre bout du fil. «Vous me plaisez, Alvirah. Deux millions feront l'affaire. Sortez-les en liquide. Ne donnez pas l'impression qu'il se passe quelque chose d'anormal. Pas de billets marqués, mon chou. Et ne vous avisez pas de prévenir les flics. Nous gardons l'œil sur vous.» (à suivre...)