ll était ce qu'il en était. — Que la paix et l'abondance soient sur toi ! Notre chambre est en soie, votre chambre est en lin et la chambre de l'ennemi est un nid de souris. Messieurs et nobles Seigneurs, que nous soyons guidés, que vous soyez guidés sur la voie du bien et de la foi. On raconte qu'un homme avait deux femmes, chacune d'elles avait un garçon et une fille. Un jour parmi les jours, il leur rapporta de la laine de mouton qu'elles allèrent laver à la mer. Au retour, la seconde femme dit à la première : — Comment allons-nous porter la laine mouillée ? Elle est trop lourde ! Laisse-moi te frapper et te transformer en vache, tu porteras la laine sur ton dos et une fois arrivées à la maison, je te rendrai ta forme humaine. Elle fit ainsi, mais quand elles arrivèrent à la maison, elle refusa de lui rendre sa première forme. Quand les enfants rentrèrent du koutteb, ils demandèrent où se trouvait leur mère. La seconde épouse leur dit en montrant la vache noire : — La voilà, c'est elle votre mère ! Les enfants pleurèrent, la supplièrent de leur rendre leur mère mais rien n'y fit. La vache, quant à elle, eut pitié de ses enfants et vint dormir tout près d'eux. Le lendemain, ils l'emmenèrent au pré mais avant de partir, la seconde épouse leur donna leur repas : du pain rassis et sec. Dans le pré, la vache noire traîna un moment, tourna autour de ses enfants, triste et impuissante, mais quand vint l'heure du repas et qu'elle vit le morceau de pain sec que ses enfants allaient manger, de ses pis coula du miel et du lait et elle déféqua des dattes. Les enfants mangèrent à leur faim et remercièrent Dieu, puis ils passèrent la journée à jouer dans le pré et, le soir, ils rentrèrent à la maison. Tous les jours ce fut ainsi, jusqu'au moment où la seconde épouse dit à son mari : — Pourquoi mes enfants qui mangent de la viande et des fruits ont-ils le teint pâle alors que les tiens qui ne mangent que du pain de son sec, ont les joues roses et sont épanouis ! ll ne lui répondit rien et le matin, elle envoya son propre fils afin qu'il sût ce qui se passait. A midi, la vache meugla pour appeler ses enfants, ils s'approchèrent accompagnés du petit garçon avec qui ils partagèrent miel, lait, dattes et à qui ils commandèrent de ne rien dire surtout à sa propre mère car elle leur ferait du mal. Le petit garçon mangea avec appétit puis joua jusqu'au soir. En rentrant, sa mère le questionna sur ce que mangeaient les autres enfants. Il lui répondit qu'ils mangeaient du pain rassis et rien d'autre. Elle n'en fut pas convaincue et, le lendemain, elle envoya sa fille lui apporter le fin mot de cette histoire. A midi, comme d'habitude, la vache noire meugla, les enfants ne bougèrent pas sachant que leur demi-sœur rapporterait tout à sa mère. La vache continua de meugler de plus belle puis s'approcha d'eux et leur donna du miel, du lait et des dattes. La fille mangea de tout, puis cacha sous ses vêtements quelques dattes, s'enduit la frange avec du miel, et partit jouer comme si de rien n'était. De retour à la maison, elle fut interrogée par sa mère et elle se pressa de lui montrer les dattes et le miel. Alors, furieuse, la belle-mère s'écria : — C'est donc ça ! La vache noire a des pis magiques et des excréments miraculeux ! Cette fois, je vais définitivement m'en débarrasser ! Quand son mari rentra, elle lui dit : — J'ai envie d'un morceau de viande de la vache noire, sinon je ne resterai pas une minute de plus dans cette maison !