Phénomène n D'innombrables petits commerçants pullulent au marché central de Mila et se disputent la moindre parcelle d'espace pour vendre, à la criée, mille et un produits destinés à la table du f'tour. C'est une activité saisonnière qui permet à beaucoup, le plus souvent des personnes sans emploi régulier, de gagner une somme rondelette à la faveur du mois de jeûne. C'est aussi un spectacle de rue haut en couleurs, régulièrement émaillé de disputes qui se terminent souvent en «happy-end» à la suite de l'intervention d'un «arbitrage» improvisé par un passant ou un sage du marché. Tout se vend ici, à même le sol, sur des tables de fortune, sur un carton retourné, une caisse en plastique ou une petite table. Cela va des confiseries maison, aux diouls destinés à envelopper la farce du bourak, ou encore aux légumes frais du jardin, sans oublier le persil et les petits bouquets de coriandre pour parfumer la chorba. Pour Hadj Omar, qui compte 60 ans de fréquentation assidue du souk, on ne peut imaginer un mois de ramadan sans ces activités qui créent, au marché central, une joyeuse cacophonie, agrémentée de bousculades, dans un décor débrayé et au cœur d'une hygiène toute approximative. Ce sont les prix bon marché, semble-t-il, qui attirent toute cette foule bigarrée, mais l'envie qui s'empare des jeûneurs quelques heures avant la rupture du jeûne leur vaut aussi de multiplier les allées et venues, avant de succomber, enfin, devant une jolie corbeille en osier, débordant de figues, un fruit de saison dont la récolte est, cette année, abondante et de bonne qualité. Le mois d'août a toujours constitué la bonne période pour les amateurs de figues de Barbarie, mais avec le ramadan, cette douceur rustique tant prisée par les Miléviens, plus qu'ailleurs peut-être, a eu droit à un sursis de quelques semaines, qui a «profité» également au melon «cantaloup» et à la pastèque «para». Tarek, 28 ans, vend chaque année, à pareille période, des diouls pour gagner de quoi s'offrir un ramadan décent et couvrir les dépenses de l'Aïd el-fitr. Quant à Cheikh Ali, il estime que ces vendeurs de ramadan, «ne sont là que pour déranger le souk et perturber le travail des bons commerçants». L'approche de l'Aïd n'atténue en rien l'activité des petits commerçants du ramadan, qui s'adaptent plutôt en proposant des produits de circonstance…