Résumé de la 1re partie n Jean-Pierre Ronac'h prend toutes les dispositions pour achever la construction du vaisseau «le Jean Bart» avant que l'invasion allemande n'atteigne Saint-Nazaire... Il faut en effet préciser que le cuirassé est en construction dans une forme de radoub, c'est-à-dire un immense bassin de béton fermé par des écluses donnant sur la mer, qui seront ouvertes au moment de la mise en eau. Le bassin communique avec l'extérieur par un chenal qui n'est pas encore achevé. Il était prévu de débuter les travaux plus tard. Maintenant, évidemment, tout est changé. A son tour, l'ingénieur des ponts et chaussées se présente devant le capitaine de vaisseau Ronarc'h, qui lui annonce comme date ultime le 19 juin. Sa réaction est la même que celle de son collègue : — C'est de la folie ! — «Le Jean Bart» n'aura qu'une partie de ses équipements. Vous gagnerez un mètre de tirant d'eau. — Même dans ces conditions, nous n'aurons pas le temps de creuser à la profondeur nécessaire. — Je vous demande de laisser dix centimètres en dessous de la quille et, pour la largeur, dix mètres de chaque côté. — Dans ce cas, «le Jean Bart» ne passera jamais. — Il passera ! Ce n'est pas tout. Une fois l'ingénieur des ponts et chaussées parti, Pierre-Jean Ronarc'h appelle au téléphone le ministère de l'Armement. Il a un autre problème à résoudre. Les Allemands ont la maîtrise totale du ciel et leurs avions effectuent un peu partout des raids destructeurs. S'ils arrivaient jusqu'à Saint-Nazaire, «le Jean Bart», avec sa masse énorme, serait une cible immanquable. Au ministère de l'Armement, Pierre-Jean Ronarc'h tombe sur un responsable affolé et totalement dépassé par les événements. — J'ai besoin des défenses antiaériennes du «Jean Bart». Quand pouvez-vous me les livrer ? — Savez-vous où elles sont ? — A la fonderie de Ruelle. Il faut accélérer leur construction. Il y a douze batteries de 90 mm. — Nous allons voir ce que nous pouvons faire, mais nous ne vous promettons rien. nous sommes débordés. Lorsqu'il raccroche, le capitaine de vaisseau Pierre-Jean Ronarc'h est sans illusion. Il n'a rien à espérer des autorités. La DCA du «Jean Bart» ne sera jamais là à temps. Il faudra faire comme si les avions ennemis n'existaient pas. Le mois de mai 1940 se passe. Partout en France, les catastrophes s'accumulent. A Saint-Nazaire, c'est une atmosphère de fourmilière qui règne. On travaille jour et nuit, tant à l'assemblage du navire qu'au creusement du chenal. Les horaires réclamés par le capitaine de vaisseau Ronarc'h sont largement dépassés. Par fierté, par patriotisme, les hommes travaillent jusqu'à complet épuisement. Et cet acharnement porte ses fruits : le 3 juin, une première hélice est mise en place ; le 7, la deuxième est à son poste ; le 10, c'est au tour du moteur et des chaudières. Mais si tout va relativement bien du côté du chantier naval, un problème surgit avec le creusement du chenal. Le 10 juin, l'ingénieur des ponts et chaussées vient trouver Ronarc'h : — Nous ne serons pas prêts pour le 19. — Que se passe-t-il ? — Il y a un imprévu : nous sommes tombés sur de la roche. Nous n'aurons pas la largeur voulue. — Laquelle pouvez-vous me donner ? — Cinquante mètres, pas plus. — «Le Jean Bart» en fait trente-cinq. Il reste sept mètres cinquante de chaque côté. — Il y a un coude. Pour tourner, ce ne sera pas suffisant. — On verra (à suivre...)