Résumé de la 1re partie n Frédéric Hofmann, alias Martin, est emprisonnié par les Allemands, il prépare son évasion... Quant à la suite que va recevoir sa demande, il est confiant. S'il n'est pas agriculteur de profession, il est doué de qualités athlétiques exceptionnelles ; c'est même un véritable colosse et un garçon comme lui peut rendre n'importe quel service à la campagne. Et effectivement, peu après, il se retrouve en compagnie des quatre autres élus : Jérôme, un cultivateur berrichon, François, ouvrier agricole du Nord, Joseph, viticulteur à Mâcon, et Antoine, fermier dans la Nièvre. Ils sont convoyés par l'Oberleutnant Molder, qui monte avec eux dans le camion militaire et les fait descendre à la gare. Là, ils attendent tous les six sur le quai le train pour Konigsberg. Le spectacle de ces prisonniers avec les grosses lettres KG, «Prisonnier de guerre », sur leur veste et du militaire qui les accompagne n'attire nullement l'attention : c'est un spectacle courant dans le pays. Enfin, le convoi arrive et ils s'installent dans un compartiment. Frédéric Hofmann attend qu'ils soient tous assis pour lancer à l'Oberleutnant, avec son plus charmant sourire : — Tête de porc ! Vieux salaud ! L'Allemand n'a pas de réaction, à part une mimique agacée. Les autres se tournent vers Frédéric : — T'es devenu dingue ou quoi ? Tu veux nous faire revenir au stalag et nous flanquer au cachot ? — Pas du tout. Je voulais savoir si cet abruti comprenait le français. Maintenant que je sais qu'on peut parler, je vais vous dire ce qu'on va faire : on va s'évader ! Il y a un silence stupéfait. L'Oberleutnant Molder regarde le paysage par la vitre sans la moindre réaction. Un des prisonniers sort alors de sa musette le morceau de pain qu'on leur a donné pour le voyage. Frédéric Hofmann l'arrête d'un geste : — Gaspille pas la nourriture. Tu en auras besoin pour traverser l'Allemagne. L'autre le regarde comme s'il était en présence d'un fou et plante quand même les dents dans son quignon. — Si tu veux t'évader, évade-toi. Moi, ça ne me dit rien. J'ai envie de me la couler douce dans cette ferme et pas de risquer ma peau. La voix de l'Alsacien se fait alors pressante : — Arrête, je te dis ! J'ai besoin de toi, de vous tous ! Sans vous, je ne peux rien faire. — De nous ? Et qu'est-ce tu veux qu'on fasse ? — Rien. Vous n'aurez rien à faire et c'est pourtant grâce à vous qu'on va s'évader. — Alors là, c'est sûr que tu es complètement givré ! — Non, ça fait longtemps que je réfléchis à mon coup. Il est simple et il doit marcher. Il suffisait d'y penser. Ecoutez... Alors Frédéric Hofmann raconte ce qu'il a mûri dans le plus grand secret depuis des mois et, à mesure qu'il parle, il voit les regards de ses camarades s'illuminer. Quand il a terminé, celui qui voulait manger son pain le remet dans sa musette. — Excuse-moi, mon pote, je m'étais trompé. Tu n'es pas fou. Je diraisw même que tu es génial ! Je marche. Un triple «Moi aussi !» lui fait écho. Ils sont tous d'accord. Les dés sont jetés. Une des plus incroyables évasions de la dernière guerre est commencée. L'Oberleutnant Molder regarde toujours par la vitre, sans se douter de la suite des événements ni du sort qui l'attend. (à suivre...)