De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi Les acteurs culturels engagés dans la scène locale ne semblent pas se soucier des bilans de leurs activités annuelles pour apporter des correctifs. La page est vite tournée sur l'exercice écoulé au point d'enfouir tous les ratages artistiques sans les affronter de face. On songe d'ores et déjà à l'année 2009 et son lot de programmes qui sera calqué sur le précédent, tant les commissions culturelles locales demeurent collées aux basques des «commis» des pouvoirs publics. La dépendance artistique régionale est ainsi contrainte de se plier aux plannings conjoncturels de la tutelle qui injecte des programmes inhérents à la spécificité de chaque région avec quelques fantaisies. Une façon de dissimuler les lacunes générées par le manque d'improvisation et d'imagination pouvant émaner d'autres initiatives, qui, malheureusement, n'ont pas leur place dans un tel calendrier. Le remake des éditions précédentes est affiché avec les semaines culturelles interwilayas. Constantine sera présente avec ses deux festivals traditionnels de Dima jazz et du malouf. Il a été décidé d'organiser des journées de théâtre maghrébin coïncidant avec la journée mondiale de cet art. La manifestation se veut un échange de «planches» entre tous les férus de la scène avec en prime des conférences animées par des invités maghrébins. En plus des journées consacrées à la poésie féminine, l'écrivain Malek Haddad sera «ressuscité» à travers l'organisation d'un événement évoquant sa disparition et qui sera sanctionné par la meilleure œuvre poétique. Cela devrait avoir lieu en juin 2009. Telles sont les grandes rencontres culturelles propres à la ville du vieux Rocher pour cette année. Les artistes locaux n'en demandent pas tant, n'attendant que des invitations pour s'exprimer «automatiquement» et sans prendre la moindre initiative de remplir le grand écart observé sur le calendrier. En matière de livres, la voie du bricolage est plutôt ouverte aux expositions purement commerciales, en témoigne l'actuel salon «constantinois du livre» qui se tient à l'ex-Souk el Fellah, donnant le premier ton amateur aux activités culturelles 2009. Pis, le salon est sans thème ! On ne peut être plus clair sur «le troc» caractérisant cette manifestation sous les regards indifférents des responsables culturels. Quant au TRC, référence du Constantinois, il ne fait que dans l'adaptation, loin de l'originalité l'ayant propulsé sur le devant de la scène pendant le dur règne du parti unique. De plus, l'institution semble mal digérer «sa dissidence artistique» calfeutrée, mais tout au moins soutenue par l'apport des pouvoirs publics, en inadéquation avec une production alléchante. Le Théâtre régional de Constantine vit mal sa métamorphose pluraliste. La grande nouveauté, cette saison, réside dans la réception du palais du bey qui servira, selon la direction de la culture, de musée des arts populaires même si les contours de son utilité ne sont pas encore déterminés. Alors que d'autres voix proposent, par exemple, des ateliers sur l'enseignement «moderne» de l'histoire, autrement dit une nouvelle conception de transmission de l'évènement historique, qui permet aux moins initiés de s'intéresser aux itinéraires lointains des peuples. Le palais attirera à coup sûr l'attention de toute la population locale et même celle des autres régions. Actuellement en ultime phase de restauration, il pourrait rouvrir bientôt ses portails, après un quart de siècle de fermeture pour sa réhabilitation. Toujours dans le cadre des «projets» réceptionnés, le musée Cirta aura son émule. En effet, le directeur de la culture a fait part de l'ouverture d'une galerie d'art moderne dans les locaux de l'ex-grand supermarché «le globe». La direction vient de récupérer ces espaces pour exposer des œuvres artistiques, surtout si l'on sait que la galerie d'Issiakhem, intégrée à la maison de la culture El Khalifa, a été détournée de sa vocation initiale, ayant transité par plusieurs activités, y compris la vente de chaussures ! Pour les nouveaux bâtis, l'idée de construire un opéra demeure toujours dans l'expectative. Bien que l'assiette du projet soit retenue, selon le wali, dans la nouvelle ville, l'inscription de ce méga-chantier devra passer par son inscription. A cet effet, les responsables locaux croisent les doigts d'autant que la nouvelle loi de finances a été signée par le président de la République. «Sous peu de jours, l'on saura si le projet est ratifié», espère M. Nettour. En définitive, la scène culturelle constantinoise version 2009 s'annonce sous un ton de bricolage par un premier salon livresque, de récupération et, surtout, de prétention par cette fameuse histoire d'opéra… qui tente de dissimuler le manque d'initiative. Le comité communal ne devrait pas rester les bras croisés et attendre des sentences. Au contraire, la responsabilité des suggestions lui échoit, également, pour «colmater» un tant soit peu ce programme creux et machinal.