A. Lemili Médecins et sages-femmes revendiquent des conditions de travail décentes pour ne pas dire humaines notamment pour la préservation des patientes et les nouveaux-nés. Même si comparativement à leurs homologues des autres secteurs sanitaires nettement bien lotis aussi bien sur le plan financier selon le rapport quantité de travail/rémunération perçue pour un identique volume horaire, leur coup de gueule est loin d'un quelconque chantage financier, mais vient surtout pour rappeler aux responsables auxquels, en vain, ils ont fait état depuis des années de leurs difficultés à exercer dans des conditions épouvantables indignes tant sur le plan humain que sur les obligations de l'Etat à veiller à la préservation de l'intégrité physique de ses citoyens et en l'espèce de patientes appelées à donner la vie. Ces conditions sont effectivement effroyables si compte est tenu des affirmations qui nous ont été fournies sur place par les médecins et les sages-femmes, des affirmations qui ne sauraient être mises en cause. Celles-ci ayant déjà fait l'objet, il y a moins de deux ans, d'une enquête publiée par La Tribune. «Au jour d'aujourd'hui, nous dira une docteure, nous assurons avec une sage-femme la garde de 60 patientes dont la grossesse est à haut-risque. Cela dans un espace prévu pour le tiers des personnes admises...à savoir 22 lits». L'histoire du lit occupé par deux parturientes ne relève pas de l'imagination, mais de la triste réalité. «Pis, ce qui est encore de la plus grande gravité est que deux femmes qui ont accouché par césarienne se retrouvent avec le plus grand risque dans un même lit», ajoutera une sage-femme qui regrette également que «...cette situation indépendante de notre volonté, mais dans laquelle n'ont toutefois rien à voir les patientes conduisent ces dernières à entrer entre elles dans des conflits personnels auxquels sont assez souvent associés les parents et les proches, tout cela avec les risques de dérapages inhérents». 1 500 accouchements par mois en l'absence d'un personnel médical spécialisé en cas de risque majeur, de moyens matériels, d'absence de conditions de sécurité notamment pour le personnel quotidiennement exposé aux humeurs des parents des parturientes. «Nous vous en donnons pour preuve une agression dont j'ai été victime il y a quelques mois et qui m'a valu la suture d'une arcade sourcilière», dira l'une des docteures du service ajoutant : «Les insultes, les menaces, les cris sont monnaie courante et nous avons pris l'habitude de faire avec.» En décidant d'entreprendre des travaux de réhabilitation au sein du service de maternité, l'administration a encore plus compliqué la situation sachant que désormais la cinquantaine de parturientes, en moyenne, présentes devrait être cantonnée dans un espace encore plus réduit, autrement dit un étage. «Une usine à gaz qui ne dit pas son nom au moment où les maternités sophistiquées, hyper équipées des autres secteurs sont dramatiquement vides», estime l'une des protestataires. Effectivement rien n'explique rationnellement le fait que les hôpitaux du Khroub, la cité El-Bir, Didouche-Mourad persistent à orienter leurs patientes sur le service de maternité de Constantine. En fait au-delà de ces secteurs, la situation est rendue encore plus grave avec l'orientation de patientes à partir des wilayas limitrophes : Mila, Skikda, Oum El Bouaghi, Sétif, Bordj Bou Arréridj. Enfin, comme un malheur ne semble jamais venir seul, la fermeture pour réhabilitation de l'EHS Mère-Enfant de Sidi-Mabrouk, un important faubourg de Constantine, vient en rajouter au désordre et surtout à la détresse des sages-femmes. A. L.