Le mot est désormais entré dans le parler de tous les jours. On l'emploie pour prévenir d'un péril dans l'accès à un bus, par exemple, aux portières duquel on se violente pour avoir une place assise. Ou devant le choix d'aller voir un match de foot, on dit, en s'alarmant : «Les gars du Daech sont partout !» Avec cette idée rivée dans la tête par les mécanismes médiatiques internationaux, qui ne ratent pas une seconde de temps réel pour investir les supports audiovisuels, ainsi que la presse écrite. Il y a à peine un tout petit lustre, en Algérie, chez nos voisins du Maghreb, en France – parce que nous avons avec ce pays des liens permanents dans toutes les espèces de relations – ou ailleurs dans les autres pays du monde, dans tous les continents, juste avant le déclenchement du «printemps arabe», eh bien, les consciences qui suivent le déroulement des évènements du monde, celles qui sont au quart de tour sur l'actualité de la violence, n'ont pas eu pour leur argent à propos de l'élimination physique de Oussama Ben Laden, le chef militaire et moral d'Al-Qaïda – les Américains n'affirmaient aucun doute sur cette formation commanditaire de l'attentat du 11 septembre contre New York et Washington. Mais qu'à cela ne tienne, pour rappel, la famille Bush, depuis le père qui prétexte Saddam Hussein envahisseur de pays souverain et détenteur de terribles unités militaires et d'armements planétaires destructeurs, afin de coaliser contre ce pays bourré d'hydrocarbure. Au moment propice de la déflagration de l'Empire soviétique, la chute du mur de Berlin et l'avènement de la mondialisation en tant que modèle d'échanges internationaux officiel, le tout synonyme de la fin de la guerre froide. Jusqu'au fils, dont les sponsors ne comptent pas rester au stade de quelque manque à endiguer, sevré d'addiction éthylique et remis à l'âme de la foi chrétienne, qui va apprendre à laisser excellemment manier les véhicule médiatiques pour faire accroire au monde que le ressortissant -Oussama Ben Laden- de la terre sacrée de l'islam, l'Arabie saoudite en l'occurrence, fait la dissidence avec les Gardiens des Lieux Saints dans le but de partir en Mésopotamie réveiller les très vieux démons de Nabuchodonosor et de Hammourabi, l'inventeur du premier code juridique que l'humanité ait connu, presque 2000 ans avant Jésus-Christ, pour y mettre à la place la charia. Au détriment de la démocratie et de tous ses attributs, entre autres, qui permettent les meilleurs rapports entre les individus et les groupes dans un pays donné, d'une part, et qui assurent les relations mutuelles profitables entre les Etats, d'autre part. Et cela fait cyniquement terrible dans l'imaginaire du chef de l'Etat yankee que d'opérer le glissement du «péril islamique» de la terre du wahhabisme vers celle des descendants de la tour de Babel – menaçant le Tout Puissant, selon les plus vieilles écritures sacrosaintes, dont le Coran n'en explicite pas. L'ultime phase d'endiguement À l'époque du GIA - ou des GIA - (Groupes islamiques armés), de l'AIS (Armée islamique du salut) ou du Gspc (Groupe salafiste pour la prédication du combat), mis à part la France, dans une certaine proportion attenante aux liens historique, migratoire et commerciaux, dans une situation particulière où l'Algérie était quasiment en cessation de paiement, l'Occident ne donnait pas l'impression de craindre la menace de l'islamisme radical. À sa tête les Etats-Unis à travers les démocrates menés par Bill Clinton. Ce dernier tentait de paraître aux yeux de ses concitoyens et du monde comme le plus lucide défenseur des principes de liberté, dans le genre du Labor britannique, mais surtout comme très respectueux de la «chose» islamique, voire islamiste - on lui prêtait même une sorte de bienveillance pour l'islam orthodoxe, dont maints spécialistes des religions dans le monde contemporain n'ont pas hésité de faire une sorte de rapprochement entre le fondamentalisme musulman et l'idéologie cultuelle, radicale, élevant le puritanisme protestant dans la Nouvelle-Angleterre, puis dans l'ensemble des Etats-Unis, et qui a nourri le patriotisme triomphant durant la Guerre d'indépendance. «Les valeurs musulmanes d'engagement personnel dans la foi et de service à la société sont des valeurs universelles. Elles ne connaissent aucune limite de nationalité, de race ou de religion. Ce sont des valeurs que nous partageons tous», avait-il déclaré le jour de l'Aïd el Fitr aux musulmans américains en mars 1995, dans la troisième année de son premier mandat. De ce point de vue «démocrate», d'autres commentateurs considèrent que les Américains et les Musulmans ne possèdent pas en commun un passé d'une quelconque animosité de grave virulence, type de croisade, de colonisation ou de guerre ouverte, comme avec les Européens – on ne s'étonne pas d'ailleurs que Bill Clinton et son staff évitaient de prononcer les termes de «terrorisme islamique» ou de «fondamentalisme musulman», dans les cas d'attentats impliquant des forces islamistes. En tout cas il existe comme une quasi évidence, au sortir de la Guerre froide et les nouvelles approches du monde. Les USA des démocrates cherchaient des amitiés dans le monde, parmi les Musulmans, entre autres, tandis que les Républicains, au lieu de cela, ils traquaient des schémas crédibles pour remplacer les objets classiques de la Guerre froide. Des éléments à considérer dangereux pour les mettre en position de crainte universelle, dans l'idéologie du branle-bas du containment, primordiale pour les instincts de domination américains, qui ont besoin d'endiguer. Et c'est donc Georges Walker Bush et son équipe de prédilection, proche des grands intérêts de l'industrie du pétrole, de l'armement et des médias, qui vont désigner ce péril à mettre l'intérêt «suprême» dessus : le péril vert, qui doit nécessairement aujourd'hui s'appeler Daech ou EI. Il menace de contrôler de vastes gisements d'hydrocarbures – capable d'en esquinter les installations – au Moyen-Orient et en Afrique. L'Otan et l'ONU ont peur que toutes les filières armées islamiques rejoignent Daech, Fedjr Libya de la Tripolitaine, du Fezzan et du Cyrénaïque, Boko Haram du Delta du Niger, et qui sait encore de quel groupuscule à rejoindre El Baghdadi, à qui il faut un peu de longévité «stratégique» pour faire avancer les pions sur l'échiquier de la prochaine véritable guerre froide, dans le sens où elle donnerait froid dans le dos : le dernier retranchement du libéralisme, la guerre contre lui-même, parce que celle-ci ne sera pas en mesure de le protéger. N. B.