Le royaume du Maroc est, désormais, le 55e membre de l'Union africaine (UA). Après avoir claqué la porte de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) avec désinvolture et beaucoup de mépris en 1984, la monarchie alaouite rentre à nouveau dans le rang africain sans gloire ni panache. Sa demande d'adhésion à l'UA, aux allures d'un véritable acte de «repentir», a été froidement reçue et entachée par les réserves pertinentes de plusieurs membres influents de l'Union, en raison de sa colonisation de la République sahraoui (Rasd) qui figure parmi les membres fondateurs de l'organisation continentale. En signant l'Acte constitutif de l'UA, le Maroc reconnaît, clairement et sans ambages, le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination et à l'indépendance. Son admission ressemble, en quelque sorte, à une seconde chance qui lui est offerte pour se racheter et faire amende honorable aux textes fondateurs de l'UA. «Concrètement, le Maroc a accepté sans conditions les principes et les objectifs contenus dans l'Acte constitutif, et c'est pour cela qu'il a été admis à UA», explique le ministre sahraoui des Affaires étrangères, Mahamed Salem Ouled Salek, en ajoutant : «Maintenant, nous allons veiller à ce qu'il respecte ses propres engagements au sein de l'UA.» Sitôt «réintégré», la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement de l'UA a appelé le Conseil de sécurité de l'ONU à «assumer pleinement ses responsabilités en restaurant le plein fonctionnement de la Minurso (Mission des Nations unies pour le référendum au Sahara occidental) qui est indispensable à la supervision du cessez-le-feu et à l'organisation du référendum». C'est dire que la cause du peuple sahraoui reste au centre des préoccupations du continent qui se consacre en priorité à se défaire du dernier foyer du colonialisme. Les dirigeants africains ont également interpellé le Conseil de sécurité sur «la question des droits de l'Homme et à celle de l'exploitation illégale des ressources naturelles du Sahara occidental». Le Maroc sait parfaitement que son adhésion à l'UA va accentuer sur lui la pression internationale pour l'organisation d'un référendum d'autodétermination au Sahara occidental. Les amis de la Rasd, très nombreux en Afrique, ne manqueront pas de le lui rappeler très souvent, maintenant qu'il siège avec eux. L'occasion a été aussi mise à profit par les dirigeants de la Rasd pour damer le pion au Maroc, en soulignant leur disponibilité à coopérer avec lui pour un règlement définitif du conflit. «La République sahraouie est disposée à négocier avec le Maroc pour qu'il mette fin à l'occupation de ses terres», annonce encore Ouled Salek. Au-delà du siège de l'UA et des cercles officiels, la société civile africaine n'a pas manqué, non plus, de rappeler à l'occasion son attachement actif et sa profonde sympathie pour la question du Sahara occidental. Le Congrès national africain (ANC), l'historique parti sud-africain, a exhorté le Maroc à régulariser sa situation à travers le respect scrupuleux des textes fondateurs de l'UA et des résolutions onusiennes relatives à l'indépendance de son voisin du sud. Des invites similaires émanent aussi de mouvements de masses anticoloniaux et d'organisations panafricaines dédiées au développement économique et à l'émancipation humaine du continent. Mohamed VI et sa cour en sont avertis. Ils seront, dorénavant, plus exposés aux pressions, aux critiques et aux réprobations des africains qu'ils ont longtemps dédaignés avant de revenir au bercail tête baissée. K. A.