La résistance contre toute forme d'asservissement et d'oppression, celle du colonisateur ou celle d'un dictateur qui brime son peuple, l'engagement pour défendre les valeurs humaines au prix de multiples sacrifices sont les thèmes principaux ayant fait vibrer les planches du Théâtre national algérien Mahieddine Bachtarzi (TNA) mercredi et jeudi derniers dans le cadre des représentations programmées à l'occasion du 1er Festival international de théâtre d'Alger, placé sous la bannière de la manifestation du 2ème Festival panafricain d'Alger, Panaf 2009. Le théâtre Kaidara du Bénin a ainsi présenté mercredi dernier Kondo le requin. Cette fresque historique décrivant la résistance du roi Danxoméen Ghéhanzin surnommé Bhanzin (le requin) contre la colonisation française est écrite par Jean Pliya et mise en scène par Tola Koukoui. Dans la fiche de présentation de la pièce, il est souligné : «A l'instar des grands résistants comme El Hadj Omar ou Samory Toure, le roi Bhanzin nous rappelle le grand peuple que nous n'aurions jamais dû cesser d'être. Pour dignement prendre le train de l'émergence, nous avons le devoir de revisiter notre passé pour mieux nous projeter dans l'avenir.» Durant plus de deux heures, près d'une quarantaine d'artistes béninois ont subjugué le public du TNA, tant par la qualité de leur interprétation que par la thématique présentée. Le seul petit bémol est le manque de rythmes dans certains passages. Au-delà de l'aspect historique, où chaque Africain victime de la colonisation peut s'identifier, la troupe béninoise a gratifié l'assistance d'un véritable voyage culturel lui permettant de découvrir les danses, les chants, la cuisine et les rituels de leur patrie, dont le somptueux tableau de la cérémonie du couronnement du roi. A cet effet, une attention particulière a été portée aux costumes, à la scénographie et à la maîtrise des techniques de sons et de lumières qui ont ébloui les amateurs du 4eme art. Quant à la troupe burkinabaise «le Théâtre de la fraternité», elle a présenté jeudi dernier la pièce intitulée la Musaraigne, écrite par Jean-Pierre Daogo Guingane et mise en scène par Luca Giovanni Maria Fus. La soif du pouvoir et l'oppression du peuple sont la thématique centrale de la pièce qui dénonce en filigrane les régimes totalitaires, malheureusement d'actualité en Afrique. La Musaraigne relate l'histoire d'un roi, interprété par Wilfrid Bambara, assoiffé de pouvoir, qui conclut un pacte avec un vieillard pour régner éternellement. Une bague, symbole du pacte, ne doit plus quitter l'auriculaire gauche du roi. Mais avant que le pacte soit entériné, le monarque tyrannique doit sacrifier quinze personnes et plonger la bague dans leur sang durant sept jours. Après cet ignoble acte, tous ceux qui apprennent à aimer et à désirer le pouvoir seront progressivement éliminés par une musaraigne géante, qui demeurra aux côtés du despote tant que durera son règne. Le peuple est la première victime de ce dictateur sanguinaire. Brimés, persécutés, privés de liberté d'expression, les sujets du roi grognent en silence mais n'osent pas se rebeller par peur des représailles. Même les courtisans craignent les foudres royalistes et vivent terrés comme des rats, vautrés dans les vices, la corruption et la luxure, à l'exception de la reine, incarnée par la talentueuse Minata Diene. Au milieu de ce sombre état de fait, un être osera braver les interdits au péril de sa vie. Il s'agit de Bilal, poète et philosophe populaire, campé par Marcel Compaoré. Le troubadour ne cesse d'user de rimes et de vers pour réveiller les consciences de ses compatriotes et encourager les opprimés à briser leurs chaînes. Au final, la condamnation à mort du poète engagé galvanisera les foules qui se révoltent, clamant : «Mort au roi.» Arrivés au palais, les insurgés trouvent Sa Majesté gisant dans une mare de sang. Il a été tué par la reine, agonisante, qui a sacrifié sa vie pour sauver son peuple de la tyrannie. S. A.