C'est à un véritable réquisitoire contre les ONG internationales et les partis politiques que l'assistance a assisté hier au forum d'El Moudjahid. En effet, invités à débattre du rôle de la société civile dans la consolidation du processus démocratique en Algérie, Saïda Benhabiles, ancien ministre de la Solidarité et présidente de l'Association nationale d'aide à la femme rurale, et Ramdane Taazibt, député du Parti des travailleurs et vice-président de l'APN, se sont attaqués, d'une manière acerbe, l'un aux partis politiques, «responsables de tous les malheurs de la société civile», et l'autre aux ONG internationales «dont le rôle est de manipuler». Lors de son intervention, Madame Benhabiles a dressé un tableau noir de la société civile en Algérie. «Nous n'avons pas de société civile mais des organisations de masse au service des partis politiques», a regretté l'invitée d'El Moudjahid. «La société civile doit-elle émaner de la société ou des groupes qui défendent leurs intérêts ?» s'est interrogée l'oratrice. Au sujet du financement du mouvement associatif, Mme Benhabiles a souligné que son organisation ne peut pas tenir son congrès en l'absence d'un financement. «Nous n'avons pas d'argent pour tenir notre congrès, car nous refusons l'allégeance aux ambassades et autres ONG internationales.» Lui succédant à la tribune, Ramdane Taazibt a fait une virée virtuelle à l'étranger, l'espace de quelques instants, pour chercher les responsables de l'échec de la société civile. Le responsable du parti de Louisa Hanoune s'en est pris tour à tour à Amnesty International «qui fait tout pour s'immiscer dans nos affaires internes», au National Democratic Institute (NDI) «qui est de connivence avec la CIA», (une accusation infondée quand on sait que NDI a organisé des séminaires au niveau de l'APN). L'orateur s'est attaqué à Bernard Kouchner «qui distribue des sacs de riz aux pays africains», à l'Organisation internationale du travail (OIT) «qui finance des syndicats pour mieux les manipuler». Le conférencier est allé jusqu'à s'attaquer à l'ONU. «Cette organisation veut permettre aux ONG de siéger aux côtés des chefs d'Etat.» Revenant à l'Algérie, M. Taazibt s'est attaqué au Mouvement pour l'autonomie de la Kabylie (MAK) «qui veut siéger à l'UPM». M. Mohamed Khoudja, sénateur du RND, a préféré, en dépit de son appartenance à un parti siégeant au gouvernement, user d'un langage de vérité. «La société civile doit être autonome du pouvoir et des partis politiques car elle est le garant de l'équilibre et de la stabilité de la société», a souligné M. Khoudja. Evoquant le rôle de la jeunesse dans la société civile, M. Khoudja a déclaré qu'on ne peut demander l'impossible à la jeunesse lorsqu'on sait qu'un jeune diplômé attend parfois dix ans pour trouver un travail. «L'Etat doit prendre en charge la jeunesse en lui assurant un minimum décent de vie digne», a souligné M. Khoudja. Le secrétaire général de l'Union générale des étudiants libres (UGEL), Moudjahid Smaïl, a affirmé qu'il ne peut y avoir un Etat démocratique en l'absence d'une société civile. «La démocratie dans un pays se mesure à l'action de la société civile», a-t-il précisé. Face à la fermeture du champ associatif, le responsable de l'UGEL a appelé les autorités à respecter la liberté associative. «Depuis 1995, l'Etat a gelé la loi régissant le mouvement associatif. Il est temps de délivrer des agréments aux associations.» «Une association qui ne reçoit pas d'agrément peut recourir à la justice tel que le prévoit la loi», a répliqué M. Khoudja. C. B.