Photo : Hacène Par Billal Larbi Gare routière du caroubier. En cette journée du 26 juillet, de surcroît à 11h30, une chaleur étouffante y règne, exacerbée qu'elle est par les gaz et les fumées se dégageant des innombrables cars et taxis stationnés. Des centaines de personnes, dont de nombreuses familles, attendent l'arrivée des autocars qui les mèneront chacun vers la destination de son choix. «Je pars sur Béjaïa. J'avais prévu de prendre le bus de 7 heures du matin pour éviter la chaleur, d'autant que je voyage en famille comme vous pouvez le constater. Malheureusement, un empêchement de dernière minute a chamboulé toutes mes prévisions», regrette Rezki, un enfant de bas âge dans les bras. Il faut dire que la chaleur caniculaire qui règne ces derniers jours à Alger (et sur tout le nord du pays) incite les gens à voyager tôt le matin. Chacun espère arriver «à bon port» avant midi, une heure où habituellement, le mercure dépasse les 40 degrés. A l'entrée de la gare routière, des agents de sécurité veillent au grain. Les bagages des voyageurs sont systématiquement fouillés. Rien n'est laissé au hasard. «En cette période de congés, l'affluence est à son comble. Les gens viennent d'horizons divers. Vous ne savez vraiment pas à qui vous avez affaire. Toute personne est susceptible de transporter dans ses bagages des produits prohibés ou dangereux. En tout cas, pour ce qui nous concerne, l'adage selon lequel les apparences sont trompeuses constitue pour nous une devise. C'est ce qui explique notre vigilance laquelle ne doit pas baisser d'un cran», nous dira un agent de sécurité. Aux abords de la gare, des taxieurs clandestins sont aux aguets. Ils tentent de dénicher une proie (il s'agit, généralement, de personnes très pressées ou ayant raté leur car), non sans user de tous les stratagèmes imaginables. «Que voulez-vous ? Nous n'avons pas trouvé de travail. Il nous faut tout de même vivre ! Figurez-vous que nous ne sommes pas les seuls à exercer cette activité. Personnellement, je connais des personnes respectables travaillant dans des administrations et qui, pour joindre les deux bouts, travaillent comme clandestins», nous dira un jeune trentenaire. Une fois à l'intérieur de la gare routière, il est aisé de remarquer que la propreté et l'hygiène sont de mise. Munis de frottoirs, des jeunes parcourent l'enceinte, débarrassant le sol de tout détritus et autres objets sales. A peine avions-nous parcouru quelques mètres que des cris de jeunes attirèrent notre attention. «Skikda, Oran, Annaba…» ne cessaient-ils de répéter. Renseignements pris, il s'agit des receveurs de cars qui, pour avoir le maximum de voyageurs, font tout pour détourner les clients à leur profit, proposant à ces derniers les tranches horaires qui leur conviennent le mieux. «C'est une pratique déloyale. On ne devrait pas laisser ces personnes agir de la sorte. La profession est régie par des règles que personne ne doit outrepasser. Il faut que la réglementation soit appliquée dans toute sa rigueur», nous dira un sexagénaire attablé à un café situé à l'intérieur de la gare routière. Ce dernier est bondé, à l'image d'ailleurs des autres cafés et restaurants s'y trouvant. «Je ne prends mon car que dans deux heures. Durant ce laps de temps, il me faut bien faire quelque chose. Après avoir lu les titres de plusieurs journaux, j'ai décidé de prendre mon déjeuner», nous dira un homme qui était accompagné de sa femme et de son jeune garçon. La chaleur aidant, et les nerfs à fleur de peau, il n‘est pas rare que, de temps à autre, des querelles éclatent. «J'ai voulu prendre un café mais le serveur a exigé de moi que je prenne aussi un jus ! Ce n'est tout de même pas sérieux», s'écrie un quinquagénaire. Au sujet des conditions d'attente des voyageurs, ces derniers, dans leur écrasante majorité, les jugent assez satisfaisantes. S'agissant du nombre de départs vers les différentes destinations, l'unanimité est totale au sujet du fait que des efforts ont été déployés dans ce cadre. «Durant la période comprise entre le 1er et le 25 juillet, nous avons procédé au transport de 480 000 voyageurs, soit une moyenne quotidienne dépassant les 19 000 passagers. Il faut dire que, durant les week-ends, nous enregistrons une affluence qui avoisine les 24 000 passagers. Quotidiennement, de 5h du matin jusqu' à 23h30, nous avons quelque chose comme 750 départs vers différentes destinations. Il y a lieu de vous dire que nous avons programmé plusieurs départs en nocturne d'autant qu'en journée, il fait très chaud», nous signalera M. Achour, assistant du directeur d'exploitation de la gare routière du Caroubier. En guise de nouveauté, notre interlocuteur nous parlera du nombre de plus en plus grand de bus climatisés. En outre, il évoquera le renforcement de certaines lignes, particulièrement celles qui, jusque-là, n'étaient pas assez desservies. A titre d'exemple, la ligne Alger-Jijel qui ne comptait, en cette même période de l'année dernière, qu'une seule liaison quotidienne, a vu ce chiffre multiplié par onze ! Pour Alger-Béjaïa, le nombre de départs quotidiens est de 52. C'est certainement pour permettre aux nombreux émigrés, originaires de la région, de rejoindre les leurs. Pour cette dernière ligne justement, et au sujet du mécontentement de certains passagers, M. Achour incombera cet état de fait au désir des voyageurs (canicule oblige) de prendre les premiers cars programmés tôt dans la matinée. «Mais, bien évidemment, nous ne pouvons pas chambouler le programme des départs mis en place. Il est impossible que les gens partent tous à la même heure», expliquera notre interlocuteur. Une autre «source de mécontentement» a trait celle-là à l'absence de climatisation dans certains car. «Il y a une semaine, je me suis rendu à la gare routière du Caroubier en vue de prendre le car vers Tizi Ouzou. Le quai était noir de monde et il n y avait qu'un seul car non climatisé. Le comble, c'est que ce car était démuni de fenêtres ! Par cette chaleur suffocante, le moins que l'on puisse dire est que l'emprunter aurait été synonyme d'acte suicidaire», nous assurera Lyes, un fonctionnaire travaillant à Alger et qui devait se rendre en Kabylie pour assister au mariage de l'un de ses proches. Sur un tout autre volet, et au sujet de la concurrence que pourrait engendrer la mise en service des autorails (trains régionaux) et l'effet de cette dernière sur le nombre de passagers empruntant les cars, l'assistant du directeur d'exploitation de la gare routière affirmera qu'il serait prématuré de tirer une quelconque conclusion, reconnaissant tout de même que les tarifs appliqués au niveau de ces autorails est jugé très élevé par les usagers. C'est, d'ailleurs, vers ce point que converge l'écrasante majorité des gens avec lesquels nous avons discuté au niveau des gares d'Agha et d'Alger-centre. «Il ne fait pas l'ombre d'un doute que les avantages du train sont incommensurables. Confort, gain de temps et, surtout, absence de la hantise liée aux bouchons lorsque vous êtes sur la route au volant de votre voiture. Toutefois, vous ne pouvez qu'avoir le tournis lorsque vous prenez connaissance des tarifs appliqués», nous dira un père de famille qui s'apprêtait à se rendre à Oran en compagnie de sa femme et de ses 4 enfants. Il est vrai que les tarifs appliqués ne sont pas à la portée du premier venu. A titre d'exemple, pour rallier Annaba en première classe, il vous faut payer pas moins de 2 000 dinars. Pour la deuxième classe, vous paierez près de 700 dinars de moins. Pour la liaison Alger-Oran, c'est 1 320 dinars (en première classe) que vous devez payer si vous voulez rejoindre la capitale de l'Ouest. Pour la deuxième classe, vous aurez à débourser quelque 300 dinars seulement de moins par rapport à la première classe. En termes de dessertes, il apparaît clairement que la ville de Sidi Lahouari est nettement mieux lotie. En effet, quatre départs quotidiens sont programmés vers Oran au moment où un seul l'est vers Annaba, à 18h20 pour être précis. Mais, en dépit de ces tarifs assez élevés, force est de constater que les trains sont loin de partir avec des sièges vides. Bien au contraire. L'engouement pour les trains n'a pas baissé d'un iota surtout lorsque l'on sait qu'outre la climatisation, l'aspect sécuritaire est très bien pris en charge. En effet, des agents de sécurité et des gendarmes parcourent sans cesse le train dans le but de déceler toute anomalie ou mouvement suspect. Voulant avoir de plus amples informations sur les trains et des nouveautés enregistrées à la faveur de la saison estivale, nos tentatives de joindre les différents responsables, à charge de ce dossier, se sont avérées vaines. «En l'absence de notre chargé de communication, parti en congé annuel, je ne peux vous faire le moindre commentaire. Il vous faut impérativement nous ramener une autorisation de notre tutelle», nous dira la directrice de la clientèle de la SNTF. Une attitude assez fréquente au niveau de nos administrations pendant la période de congé. Souvent, pour ne pas dire toujours, des intérimaires se réfugient derrière l'absence de prérogatives leur permettant de communiquer, prétextant l'absence de leurs responsables hiérarchiques. Nous ne comprenons pas pourquoi la SNTF a refusé de communiquer au moment où, au niveau de la gare routière du Caroubier (qui dépend aussi du même ministère, en l'occurrence celui des Transports), nous avions effectué notre travail sans le moindre problème. Dommage pour le lecteur.